Les bases juridiques
Les conventions et normes internationales
L’AIEA élabore, sur proposition des États membres, des textes de référence appelés « Normes de sûreté », décrivant les principes et pratiques de sûreté. Ils portent sur la sûreté des installations, la radioprotection, la sûreté de la gestion des déchets et la sûreté des transports de substances radioactives. Bien que ces documents n’aient pas de caractère contraignant, ils constituent néanmoins des références qui inspirent très largement le cadre juridique national.
Plusieurs dispositions législatives et réglementaires relatives aux INB sont issues ou reprennent des conventions et des normes internationales, notamment celles de l’AIEA.
Deux conventions traitent de la sûreté (Convention sur la sûreté nucléaire et Convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs) et deux autres de la gestion opérationnelle des conséquences d’éventuels accidents (Convention sur la notification rapide d’un accident nucléaire et Convention sur l’assistance en cas d’accident nucléaire ou de situation d’urgence radiologique). La France est partie contractante à ces quatre conventions internationales.
Les autres conventions ayant un lien avec la sûreté nucléaire et la radioprotection
D’autres conventions internationales, dont le champ d’application ne relève pas des missions de l’ASN, peuvent avoir un lien avec la sûreté nucléaire. C’est en particulier le cas de la Convention sur la protection physique des matières nucléaires, qui a pour objet de renforcer la protection contre les actes de malveillance et les usages détournés des matières nucléaires. Cette convention est entrée en vigueur le 8 février 1987 et comptait 157 parties contractantes au 7 décembre 2016.
Ces conventions constituent, pour la France, des outils pour renforcer la sûreté nucléaire, en soumettant périodiquement à la communauté internationale l’état des installations concernées et les mesures prises pour en assurer la sûreté.
Les textes communautaires
Plusieurs textes communautaires sont applicables aux INB. Les plus importants d’entre eux sont détaillés ci-après.
Le Traité Euratom
Le Traité Euratom, signé en 1957 et entré en vigueur en 1958, a pour objectif le développement de l’énergie nucléaire en assurant la protection de la population et des travailleurs contre les effets nocifs des rayonnements ionisants.
Le chapitre III du titre II du Traité Euratom traite de la protection sanitaire liée aux rayonnements ionisants.
Les articles 35 (mise en place des moyens de contrôle du respect des normes), 36 (information de la Commission sur les niveaux de radioactivité dans l’environnement) et 37 (information de la Commission sur les projets de rejets d’effluents) traitent des questions de rejet et de protection de l’environnement.
Les dispositions en matière d’information de la Commission européenne ont été intégrées dans le code de l’environnement (chapitre III du titre IX du livre V). En particulier, les décrets d’autorisation de création d’INB, ou prescrivant le démantèlement, ou d’autorisation de modifications substantielles d’installations entraînant une augmentation des valeurs limites de rejets ne sont pris qu’après avis de la Commission.
La directive du 25 juin 2009 établissant un cadre communautaire pour la sûreté nucléaire des installations nucléaires modifiée par la directive 2014/87/Euratom du 8 juillet 2014
La directive 2009/71/Euratom du Conseil du 25 juin 2009 instaure un cadre communautaire en matière de sûreté nucléaire et ouvre la voie à la mise en place, dans le domaine de la sûreté nucléaire, d’un cadre juridique commun à tous les États membres.
Cette directive définit les obligations fondamentales et les principes généraux en la matière. Elle renforce le rôle des organismes de réglementation nationaux, contribue à l’harmonisation des exigences de sûreté entre les États membres pour le développement d’un haut niveau de sûreté des installations et incite à la transparence sur ces questions.
Elle comporte des prescriptions dans les domaines de la coopération entre autorités de sûreté, notamment l’instauration d’un mécanisme de revue par les pairs, de la formation des personnels, du contrôle des installations nucléaires et de la transparence envers le public. Elle renforce, à ce titre, l’action de coopération entre États membres.
Enfin, elle prend en compte les travaux d’harmonisation menés par l’Association des responsables des autorités de sûreté nucléaire des pays d’Europe de l’Ouest (association WENRA, Western European Nuclear Regulators Association).
La directive 2014/87/Euratom du 8 juillet 2014 a modifié la directive 2009/71/Euratom du 25 juin 2009 et apporté les améliorations substantielles suivantes :
- des concepts convergents avec ceux de l’AIEA (incident, accident, etc.) ;
- la mise en exergue des principes de « défense en profondeur » et de « culture de sûreté » ;
- la clarification des responsabilités en matière de contrôle de la sûreté des installations nucléaires ;
- des objectifs de sûreté pour les installations nucléaires directement issus des référentiels de sûreté utilisés par l’association WENRA ;
- une réévaluation de la sûreté de chaque installation nucléaire au moins tous les dix ans ;
- la mise en place, tous les six ans, d’examens par les homologues européens sur des thèmes de sûreté précis, sur le principe des tests de résistance menés après l’accident de Fukushima ;
- l’obligation pour l’exploitant d’une installation et pour l’autorité de sûreté d’informer les populations et les parties prenantes.
Ces dispositions renforcent notablement le cadre communautaire du contrôle de la sûreté des installations nucléaires.
La directive du 19 juillet 2011 établissant un cadre communautaire pour la gestion responsable et sûre du combustible usé et des déchets radioactifs
La directive 2011/70/Euratom du Conseil du 19 juillet 2011 établit un cadre communautaire pour la gestion responsable et sûre du combustible usé et des déchets radioactifs. Elle s’applique à la gestion du combustible usé et à la gestion des déchets radioactifs, de la production au stockage, lorsque ces déchets résultent d’activités civiles. À l’instar de la directive du 25 juin 2009, la directive du 19 juillet 2011 impose l’instauration, dans chaque État membre, d’un cadre national cohérent et approprié et fixe diverses exigences aux États membres, aux autorités de réglementation et aux titulaires d’autorisation.
Pour l’élaboration de ces deux directives, les institutions de l’Union européenne ont bénéficié respectivement des travaux de l’association WENRA et de l’ENSREG/WG2 (European Nuclear Safety Regulators Group).
Comprendre
L’encadrement réglementaire de la sous-traitance
L’article L. 593-6-1 du code de l’environnement prévoit, qu’« en raison de l’importance particulière de certaines activités pour la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 593-1 du code de l’environnement, un décret en Conseil d’État peut encadrer ou limiter le recours à des prestataires ou à la sous-traitance pour leur réalisation » et que « l’exploitant assure une surveillance des activités importantes pour la protection des intérêts mentionnés au même article L. 593-1 lorsqu’elles sont réalisées par des intervenants extérieurs. Il veille à ce que ces intervenants extérieurs disposent des capacités techniques appropriées pour la réalisation desdites activités. Il ne peut déléguer cette surveillance à un prestataire ».
Les articles R. 593-9 à R. 593-13 du code de l’environnement précisent ces dispositions.
Le principe selon lequel l’exploitant d’une INB se doit d’assurer effectivement l’exploitation de son installation se traduit par l’interdiction de confier à un intervenant extérieur la responsabilité opérationnelle et le contrôle de l’exploitation d’une INB, y compris en ce qui concerne le traitement des accidents, des incidents et des écarts, ainsi que la préparation aux situations d’urgence et leur gestion.
Ces dispositions précisent également les conditions dans lesquelles un exploitant d’INB peut recourir à des intervenants extérieurs pour la réalisation d'activités susceptibles d'avoir un impact important sur les risques ou inconvénients que son installation peut présenter pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 593-1 du code de l’environnement (sécurité, santé et salubrité publiques, protection de la nature et de l’environnement). Le texte pose comme principe que l’exploitant doit limiter autant que possible le nombre de niveaux de sous-traitance. Ce principe s’applique à toutes les phases de la vie de l’INB, y compris au cours de la phase de sa construction. Le recours à la sous-traitance doit s’apprécier au regard du besoin de recourir à des compétences spécifiques et exceptionnelles.
Dans tous les cas, l’exploitant doit conserver la capacité d’assurer la maîtrise des activités sous-traitées. Il doit décrire dans ses règles générales d’exploitation les modalités mises en œuvre pour exercer la surveillance des intervenants extérieurs.
Le texte introduit également une limitation à trois du nombre total de niveaux de sous-traitance successifs, un prestataire de l’exploitant pouvant recourir à deux sous-traitants consécutifs au maximum ; cette limitation est assortie des deux possibilités de dérogations suivantes, sous réserve que l’exploitant présente des justifications suffisantes :
- en cas d’événement imprévisible affectant les conditions de réalisation de l’activité ou nécessitant des opérations ponctuelles, l’exploitant doit informer préalablement l’ASN et préciser les motifs associés ;
- lorsque le recours à un intervenant extérieur ou à des sous-traitants de rang strictement supérieur à deux permet d’assurer une meilleure protection des intérêts protégés, l’ASN peut délivrer, sur demande de l’exploitant, une dérogation par décision motivée.
La règle de la limitation s’applique dès la mise en service de l’INB jusqu’à son déclassement, pour toute prestation de services ou de travaux susceptibles d'avoir un impact important sur les risques ou inconvénients que son installation peut présenter pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 593-1 réalisée dans le périmètre de l’INB. Le respect de la limitation du nombre de niveaux de sous-traitance n’est pas un élément suffisant pour justifier de la limitation autant que possible du nombre de niveaux de sous-traitance.
Dans tous les cas, l’exploitant doit assurer la surveillance des activités susceptibles d'avoir un impact important sur les risques ou inconvénients que son installation peut présenter pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 593-1 réalisées par des intervenants extérieurs. À cette fin, il doit recueillir des informations de leur part, notamment en vue d’en tirer un retour d’expérience.
Lorsqu’un exploitant envisage de confier à un intervenant extérieur la réalisation d'activités susceptibles d'avoir un impact important sur les risques ou inconvénients que son installation peut présenter pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 593-1, il doit évaluer les offres en tenant compte de critères accordant la priorité à la protection des intérêts susmentionnés ; il doit s’assurer préalablement que les entreprises auxquelles il envisage de faire appel disposent des capacités techniques requises pour réaliser les interventions et sont en capacité de maîtriser les risques associés.
Enfin, l’exploitant doit notifier aux intervenants extérieurs le document formalisant sa politique en matière de protection des intérêts. Le contrat avec les intervenants extérieurs doit préciser les obligations nécessaires à l’application des dispositions de la réglementation relative aux INB à la charge de chacune des parties.
Les textes nationaux
Le régime juridique des INB a été rénové en profondeur par la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire (loi TSN) et ses décrets d’application. L’ensemble des dispositions législatives et réglementaires qui concernent spécifiquement les INB sont codifiées dans le code de l’environnement.
Le code de l’environnement
Les dispositions des chapitres III, V et VI du titre IX du livre V du code de l’environnement fondent le régime d’autorisation et de contrôle des INB.
Le régime juridique des INB est dit « intégré », car il vise la prévention et la maîtrise de l’ensemble des risques et nuisances qu’une INB est susceptible de créer pour les personnes et l’environnement, qu’ils soient ou non de nature radioactive.
Les dispositions du chapitre II du titre IV du livre V du code de l’environnement instaurent un cadre législatif cohérent et intégré pour la gestion de l’ensemble des déchets radioactifs.
Le chapitre III du titre IX du livre V du code de l’environnement (partie réglementaire) définit le cadre dans lequel sont conduites les procédures relatives aux INB et traite de l’ensemble du cycle de vie d’une INB, de la définition des options de sûreté, de son autorisation de création et de sa mise en service, jusqu’à son arrêt définitif et son démantèlement, puis son déclassement. Il précise les relations entre le ministre chargé de la sûreté nucléaire et l’ASN dans le domaine de la sûreté des INB.
Ces dispositions définissent les procédures applicables pour l’adoption de la réglementation générale et la prise des décisions individuelles relatives aux INB. Il définit également les conditions particulières d’application de certains régimes administratifs à l’intérieur du périmètre des INB.
Le chapitre VI de ce titre IX du livre V fixe les modalités d’application de la loi en matière d’inspection, de mesures de police et de sanctions administratives et pénales.
Les dispositions relatives au droit à l’information, à la transparence en matière nucléaire, aux CLI et au HCTISN figurent à la section 2 du chapitre V du titre II du livre Ier du code de l’environnement.