Commission des sanctions de l'ASN

Conformément aux dispositions du code de l’environnement, l’ASN a installé sa commission des sanctions le 19 octobre 2021. La mise en place de cette commission complète l’arsenal des mesures de coercition à la disposition de l’ASN.

Sur saisine du collège de l’ASN, elle aura le pouvoir de prononcer des amendes administratives à l’encontre des exploitants d’installations nucléaires de base (INB), des responsables de transport de substances radioactives ou d’exploitants d’équipements sous pression nucléaires (ESPN) ou bien des responsables d’activités nucléaires réglementées par le code de la santé publique. Son indépendance est garantie par la loi.

Composition et fonctionnement de la commission des sanctions de l’ASN

Composition

La commission est composée de quatre membres titulaires, deux conseillers d’état, désignés par le vice-président du Conseil d’état, et deux conseillers à la Cour de cassation, désignés par le premier président de la Cour de cassation. Elle comprend également quatre membres suppléants dont l’un est en cours de désignation. La durée du mandat des membres est de six ans.

Commission des sanctions de l'ASN. De gauche à droite : Bernard Bureau, Françoise Farrenq-Nesi, Jacqueline Riffault, Maurice Méda, Denis Jardel, Olivier Yeznikian (absent : Yves Gounin)

Le 19 octobre 2021, lors de leur première réunion, les membres titulaires ont élu M. Maurice MEDA président de la commission pour les trois prochaines années. Ils ont également adopté le règlement intérieur qui fera l’objet d’une publication au Journal officiel.

Fonctionnement

Comme le prévoit la loi, la commission se réunira exclusivement sur saisine du collège de l’ASN. Ce dernier peut décider de l’ouverture d’une procédure conduisant au prononcé d’une amende après avoir établi le constat qu’un responsable d’activités nucléaires n’a pas déféré à une mise en demeure, c’est-à-dire n’a pas pris les mesures répondant à cette mise en demeure.

Les amendes seront proportionnées à la gravité des manquements constatés et tiendront compte notamment de l’importance du trouble causé à l’environnement. Le montant maximal des amendes est fixé par la loi à 10 millions d'euros en cas de manquement aux dispositions applicables aux installations nucléaires de base, à un million d'euros en cas de manquement aux dispositions applicables aux équipements sous pression nucléaires, à 30 000 € dans le domaine du transport de substances radioactives et à 15 000 € pour les activités du nucléaire de proximité.

Politique de coercition et de sanction de l’ASN

L’objectif premier de l’action de contrôle menée par l’ASN est en effet d’obtenir des responsables d’activités nucléaires qu’ils assument leur responsabilité de protection des personnes et de l’environnement. Au regard de cet objectif, les moyens de contrôle doivent permettre une certaine réactivité. La réglementation relative à la sûreté nucléaire et à la radioprotection porte plutôt sur des objectifs de résultats que sur des moyens. Il convient, néanmoins, de distinguer le secteur des installations nucléaires de base (INB) du « nucléaire de proximité » (secteurs médical, industriel et vétérinaire).

L’ASN réserve ainsi l’utilisation des moyens de coercition aux situations où, face à des enjeux forts en termes de sûreté et de radioprotection, le comportement des responsables d’activité est répréhensible ou dilatoire. Lorsqu’il est nécessaire de réagir rapidement, l’ASN utilise les mesures conservatoires à sa disposition, par exemple la suspension du fonctionnement d’une installation.

S’agissant des mesures permettant le déclenchement de sanctions pénales, l’ASN a régulièrement fait usage d’outils tels que le procès-verbal ou le signalement au titre de l’article 40 du code de procédure pénale.

Au regard des modalités de contrôle et des résultats de son action passée en la matière, l’ASN envisage de saisir la commission des sanctions dans les cas combinant de forts enjeux de sûreté ou de protection de l’environnement ou de la population et des comportements dilatoires ou inconséquents d’un responsable d’activité.

Références juridiques

Les articles du code de l'environnement, la loi et la décision  de l'ASN encadrant le commission des sanctions

Foire aux questions

La Commission des sanctions de l’ASN en 15 questions

1. Depuis quand la commission des sanctions de l’ASN est-elle installée ?

La commission des sanctions de l’ASN a été créée par l’ordonnance n° 2016-128 du 10 février 2016 (article L. 592-41 à L. 592-44 et L. 596-7 à L. 596-9 du code de l’environnement) ; sa mise en place nécessitait que soient publiées les dispositions réglementaires d’application : le décret n° 2019-190 du 14 mars 2019 a créé les articles R. 592-34 à R. 592-38 et R. 596-10 à R. 596-15 du code de l’environnement.

Les membres de la commission des sanctions ont été désignés respectivement par le vice- président du Conseil d’Etat et le premier président de la Cour de Cassation, à l’exception d’un membre suppléant, ce qui n’empêche pas l’installation de la commission.

Après une prise de contact avec le collège et les services de l’ASN en 2020, la commission des sanctions a été installée le 19 octobre 2021.

M. Maurice MEDA a été élu président de la commission par les membres titulaires. La commission a adopté son règlement intérieur. Il sera publié au Journal officiel.

Pour la constitution initiale de la commission, la durée du mandat des deux membres désignés respectivement par le vice-président du Conseil d'Etat et le premier président de la Cour de cassation est fixée, par tirage au sort, à trois ans pour l'un et à six ans pour l'autre.

2. Pourquoi une commission des sanctions de l’ASN ?

A la différence des mesures de police administrative, destinées à contraindre les responsables d’activités nucléaires et à faire cesser les manquements (ex. : consignation de somme, travaux d’office, suspension ou astreinte journalière), l’amende administrative est une sanction à finalité essentiellement répressive.

Or il convient de veiller à la séparation des fonctions de poursuite et d’instruction d’une part, et de la fonction de jugement d’autre part, lorsque ces deux fonctions sont exercées au sein d’une même entité, notamment au sein de certaines autorités administratives indépendantes, comme l’ASN. Une telle obligation découle de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (sur l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et libertés fondamentales relatif au droit au procès équitable) et de celle du Conseil constitutionnel (application du principe d’indépendance et d’impartialité découlant de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 aux autorités administratives indépendantes dotées d’un pouvoir de sanction).

C’est pourquoi le législateur a prévu l’institution d’une commission des sanctions au sein de l’ASN, exerçant la seule fonction de jugement.

3. Quelle est la composition de la commission des sanctions ?

La commission est composée de quatre membres titulaires :

  • deux conseillers d'État, désignés par le vice-président du Conseil d'Etat ;
  • deux conseillers à la Cour de cassation, désignés par le premier président de la Cour de cassation.

Elle comprend également quatre membres suppléants, désignés selon les mêmes règles que les titulaires.

La durée du mandat des membres est de six ans. Le mandat des membres est renouvelable une fois.

4. Qui préside la commission des sanctions ?

Le président de la commission est élu pour trois ans par les membres titulaires de celle-ci. Il s’agit de M. Maurice MEDA.

5. Quels sont les moyens de la commission des sanctions ?

La commission des sanctions bénéficie, avec l'accord du président de l'Autorité de sûreté nucléaire, de l'appui technique d'agents des services de l'autorité, alors placés sous l'autorité fonctionnelle du président de la commission des sanctions.

Les séances de la commission auront lieu au siège de l’ASN. Des locaux du siège seront également mis ponctuellement à disposition des membres de la commission à chaque fois que cela sera nécessaire.

6. Qui peut saisir la commission des sanctions ?

C’est le collège de l'Autorité de sûreté nucléaire qui peut décider de l'ouverture d'une procédure conduisant au prononcé d'une amende administrative, après qu’il aura constaté qu’un exploitant ou responsable du transport ou d’activités nucléaires régies par le code de la santé publique n’aura pas déféré à une mise en demeure, c’est-à-dire n’aura pas pris les mesures répondant à cette mise en demeure.

7. Quel est le pouvoir de la commission des sanctions ?

La commission des sanctions peut prononcer des amendes administratives à l’encontre des exploitants d’installations nucléaires de base (INB), des responsables de transport de substances radioactives ou d’exploitant d’équipements sous pression nucléaires (ESPN) ou des responsables d’activités nucléaires réglementées par le code de la santé publique.

Si le collège de l’ASN décide d’adopter une procédure d'amende transactionnelle, dite « d’entrée en voie de composition administrative » (article L. 596-8 du code de l’environnement), la commission des sanctions homologue, le cas échéant, le projet de composition entre l'Autorité de sûreté nucléaire et le responsable concerné par la notification de griefs (voir question 12).

8. Quel est le montant des amendes que peut prononcer la commission des sanctions ?

Le montant maximal des amendes que peut prononcer la commission des sanctions est fixé par la loi à 10 millions d'euros en cas de manquement aux dispositions applicables aux installations nucléaires de base, à un million d'euros en cas de manquement aux dispositions applicables aux équipements sous pression nucléaires et à 30 000 € dans le domaine du transport de substances radioactives.

Ce montant maximal est fixé à 15 000 € pour les activités du nucléaire de proximité.

Les amendes seront proportionnées à la gravité des manquements constatés et tiendront compte notamment de l'importance du trouble causé à l'environnement.

9. Quels sont les moyens de coercition dont dispose le collège de l’ASN ?

Le collège de l’ASN dispose, pour sa part, en cas de non-respect d’une mise en demeure dans le délai imparti, du pouvoir de prononcer les mesures de police administrative suivantes :

  • consignation des sommes répondant du montant des travaux à réaliser ;
  • exécution d’office de travaux aux frais de l’exploitant ;
  • suspension du fonctionnement de l’installation ou du déroulement de l’opération de transport jusqu’à ce que le responsable se soit mis en conformité ;
  • auxquels s’ajoute, l’astreinte journalière dont le montant est fixé par jour et dont le responsable doit s’acquitter jusqu’à la satisfaction des demandes formulées à son endroit dans la mise en demeure (jusqu’à 15 000€ par jour dans le domaine des installations nucléaires de base et 1500 € par jour dans le domaine du nucléaire de proximité (articles L. 596-4 du code de l’environnement et L. 1333-31 du code de la santé publique).

10. Quelle est l’articulation des pouvoirs de coercition et de sanctions de l’ASN avec les sanctions pénales ?

L’ASN conserve, parallèlement, la possibilité d’engager des actions pénales de deux types différents. Lorsque les faits sont potentiellement constitutifs d’une infraction qui ne relève pas de la compétence de l’ASN, ces faits font, conformément aux dispositions de l’article 40 du code de procédure pénale, l’objet d’un signalement au procureur de la République. Lorsque les faits constatés sont potentiellement constitutifs d’une infraction relevant des champs de compétence de l’ASN, ses inspecteurs dressent procès-verbal, au titre du code de l’environnement ou au titre du code de la santé publique.

11. Quelle est la procédure lorsque le collège décide de saisir la commission des sanctions ?

Le collège de l’ASN notifie les griefs aux personnes concernées et en saisit la commission des sanctions.

La commission désigne un rapporteur parmi ses membres. Celui-ci peut procéder à toute audition qui lui semble utile. Il rédige un rapport d’instruction et présente les résultats de son instruction lors de la séance devant aboutir au prononcé de l’amende.

La procédure du prononcé de l’amende administrative prévoit le respect du contradictoire.

Aucune sanction ne peut être prononcée sans que l’intéressé ou son représentant n’ait été entendu ou appelé.

La décision de la commission peut être rendue publique.

Les décisions prononcées par la commission des sanctions peuvent être déférées à la juridiction administrative (Conseil d’État) par la personne concernée, par le président de l’ASN ou par les tiers.

La commission ne peut être saisie de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait pendant ce délai aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou à leur sanction. En outre, l'amende ne pourra pas être prononcée au-delà d'un délai de trois ans à compter de la constatation des manquements.

12. Qu’est-ce que la composition administrative ?

Le code de l’environnement prévoit une procédure dite « d’entrée en voie de composition administrative » (article L. 596-8), dans laquelle la commission intervient également. Dans les faits, il s’agit d’une amende transactionnelle.

Le collège de l'ASN peut, en même temps que la notification des griefs à la commission des sanctions, adresser à l'intéressé une proposition d'entrer en voie de composition administrative (article L. 596-8 du code de l’environnement).

La proposition de composition est déterminée « en fonction des circonstances et de la gravité des manquements, de la personnalité de son auteur ainsi que de ses ressources et de ses charges ». Elle précise l'amende transactionnelle que l'intéressé devra payer (dont le montant ne peut excéder le tiers du montant maximal de l'amende encourue), ainsi que, le cas échéant, les obligations qui lui seront imposées tendant à faire cesser les manquements, à éviter leur renouvellement, à réparer le dommage ou à remettre en conformité les lieux. Elle fixe également le délai imparti pour le paiement et l'exécution des obligations.

Le projet de composition entre l'ASN et l'intéressé doit être homologué par la commission des sanctions, puis rendu public.

13. Quelles sont les règles déontologiques applicables aux membres de la commission des sanctions ?

En application notamment de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes, les membres de la commission des sanctions sont tenus :

  • d’exercer leurs fonctions avec dignité, probité, intégrité et de manière indépendante,
  • de veiller à prévenir ou à faire cesser immédiatement tout conflit d'intérêts, au sens de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique,
  • de se soumettre au devoir de réserve et ils ne peuvent ainsi prendre, à titre personnel, aucune position publique préjudiciable au bon fonctionnement de l’ASN,
  • de respecter le secret des délibérations et le secret professionnel, ainsi que de faire preuve de discrétion professionnelle pour tous les faits, informations ou documents dont ils ont ou ont eu connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions.

14. Quelles sont les garanties d’indépendance et d’autonomie de décision de la commission ?

L’indépendance de la commission des sanctions et son autonomie de décision sont garanties par la loi. L’article 9 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 dispose ainsi que ses membres, dans l'exercice de leurs attributions, « ne reçoivent ni ne sollicitent d'instruction d'aucune autorité. ».

Contribuent également à la prise de décisions en toute impartialité par la commission, les dispositions législatives destinées à assurer l’identification et la prévention des situations de conflits d’intérêts :

  • la loi du 20 janvier 2017 précitée prévoit ainsi que le mandat de membre d’une commission des sanctions est incompatible avec certains mandats électoraux et certaines fonctions professionnelles. Elle prévoit également plusieurs incompatibilités entre mandats et fonctions exercés dans plusieurs ou au sein de la même autorité indépendante ;
  • en application de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, les membres de la commission des sanctions sont tenus d’adresser une déclaration d’intérêts et une déclaration de la situation patrimoniale à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) ;
  • l’article 12 de la loi du 20 janvier 2017 dispose que lorsqu'il existe un risque de mise en cause de l'impartialité d'un membre de la commission lors de l'examen d'une affaire, en raison soit de la détention d'un intérêt, soit de l'exercice d'une fonction ou de la détention d'un mandat, soit de la représentation d'une partie intéressée par le membre concerné, ce dernier ne participe pas à cet examen. Les modalités selon lesquelles le membre doit s’abstenir sont définies dans le règlement intérieur de la commission ;
  • enfin, une disposition du règlement intérieur de la commission rappelle que ses membres ne sauraient solliciter ou accepter dans le cadre de leurs fonctions, pour eux- mêmes ou pour des tiers, un avantage ou un cadeau qui puisse influencer ou paraître influencer leur indépendance, leur impartialité ou la façon dont ils exercent leurs fonctions.

15. Que prévoit le règlement intérieur de la commission des sanctions ?

La commission des sanctions a adopté son règlement intérieur au cours de la séance consacrée à son installation, le 19 octobre 2021. Celui-ci comporte les dispositions relatives à son fonctionnement, aux modalités d'instruction des demandes de prononcé d'une amende dont elle sera saisie, de convocation, de déroulement des séances, de délibération, ainsi qu’un rappel des références des textes régissant les incompatibilités et les obligations de déontologie de ses membres.