Transport des substances radioactives en France
Les transports de substances radioactives se distinguent par leur grande diversité. Les colis de substances radioactives peuvent peser de quelques centaines de grammes à plus d’une centaine de tonnes et l’activité radiologique de leur contenu peut s’étendre de quelques milliers de becquerels à des milliards de milliards de becquerels pour les colis de combustibles nucléaires irradiés.
Les marchandises dangereuses susceptibles d’être transportées sont réparties par la réglementation en 9 « classes » en fonction de la nature du risque associé (par exemple : matières explosibles, toxiques, inflammables, etc.). La classe 7 correspond aux substances radioactives. Environ 770 000 transports de substances radioactives ont lieu chaque année en France. Cela correspond à environ 980 000 colis de substances radioactives, ce qui représente quelques pourcents du total des colis de marchandises dangereuses transportés chaque année en France. La très grande majorité des transports sont réalisés par route, mais quelques-uns le sont également par voie ferrée, par mer et par air (cf. tableau 1).
Les transports de substances radioactives se distinguent par leur grande diversité. Les colis de substances radioactives peuvent peser de quelques centaines de grammes à plus d’une centaine de tonnes et l’activité radiologique de leur contenu peut s’étendre de quelques milliers de becquerels à des milliards de milliards de becquerels pour les colis de combustibles nucléaires irradiés. Les enjeux de sûreté sont également très variés. Si la très grande majorité des colis présente individuellement des enjeux de sûreté limités voire négligeables, une faible part des colis présente de très forts enjeux de sûreté.
Dans l’industrie non nucléaire et la médecine
Un peu moins de 60% des colis transportés sont à destination de l’industrie non nucléaire : il s’agit le plus souvent d’appareils mobiles contenant les sources radioactives. On peut par exemple citer les appareils de détection de plomb dans les peintures, utilisés pour les diagnostics immobiliers, ou les appareils de gammagraphie (radiographie de matériaux). Les déplacements vers les différents chantiers expliquent le très grand nombre de transports pour l’industrie non nucléaire. Les enjeux de sûreté sont très variables : en effet la source radioactive contenue dans les détecteurs de plomb a une très faible activité radiologique, alors que celle contenue dans les appareils de gammagraphie a une activité nettement plus élevée.
Environ 30% des colis transportés sont utilisés dans le secteur médical : il s’agit d’approvisionner les centres de soins en sources radioactives, par exemple des sources scellées utilisées en radiothérapie ou des produits radio-pharmaceutiques pour les diagnostics, et d’évacuer des déchets radioactifs. L’activité des produits radio-pharmaceutiques décroît rapidement (par exemple, la période radioactive du fluor 18 est proche de 2 heures). Par conséquent, ces produits doivent être très régulièrement acheminés vers les services de médecine nucléaire, ce qui occasionne un nombre élevé de transports, dont la bonne réalisation est indispensable pour la continuité des soins. La plupart de ces produits ont des activités relativement faibles ; néanmoins, une petite proportion d’entre eux, comme les sources utilisées en radiothérapie ou les sources irradiées servant à la production du technétium (utilisé en imagerie médicale), présente des enjeux de sûreté significatifs.
Dans l’industrie électro-nucléaire
Enfin, environ 10% des colis transportés en France sont en lien avec l’industrie électro-nucléaire. Cela représente environ 19 000 transports annuels, pour 114 000 colis. Ces transports sont nécessaires au fonctionnement du cycle du combustible, du fait de la localisation des différentes installations sur le territoire national. Suivant l’étape du cycle, la forme physico-chimique et l’activité radiologique des substances varient fortement. Les transports à très forts enjeux de sûreté sont plus particulièrement les transports d’hexafluorure d’uranium (UF6), dangereux notamment du fait des propriétés toxiques et corrosives du fluorure d’hydrogène formé par l’UF6 au contact de l’eau, les transferts de combustibles irradiés des centrales nucléaires vers l’usine de retraitement de La Hague (dans la Manche) et les transports de déchets nucléaires de haute activité. On dénombre annuellement environ :
- 200 transports organisés pour envoyer les combustibles irradiés des centrales nucléaires françaises vers l’usine de retraitement Orano de La Hague ;
- une centaine de transports de plutonium sous forme d’oxyde entre l’usine de retraitement de La Hague et l’usine de production de combustible MOX de Melox, située dans le Gard ;
- 250 transports d’hexafluorure d’uranium (UF6) servant à la fabrication du combustible ;
- 400 transports de combustible neuf à base d’uranium et une cinquantaine de transports de combustible neuf « MOX » à base d’uranium et de plutonium.
Itinéraires suivis par les transports
La réglementation ne prévoit pas de restriction, au titre de la sûreté, sur les itinéraires pouvant être empruntés par les transports, si ce n’est que les tunnels les plus dangereux (catégorie E) sont interdits. L’accord de l’ASN n’est donc pas requis pour élaborer les itinéraires. Cependant, les itinéraires des transports présentant les plus forts enjeux sont communiqués à l’ASN 7 jours à l’avance ; l’ASN dispose ainsi des informations nécessaires en cas d’accident. Afin de prévenir d’éventuels actes de malveillance, ces itinéraires ne peuvent pas être rendus publics. Lorsque le transport porte sur des matières nucléaires – tels les combustibles neufs ou irradiés des centrales nucléaires, d’autres dispositions sont également mises en œuvre sous le contrôle du Haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère chargé de l’environnement.
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Quels sont les risques associés à ces colis ?
Les risques induits par les transports de substances radioactives :
- le risque d’exposition externe (irradiation) de personnes, notamment dans le cas de la détérioration des composants du colis assurant la protection radiologique (c’est-à-dire qui permettent de réduire le rayonnement au contact des colis contenant les substances radioactives) ;
- le risque d’exposition interne (contamination par inhalation ou ingestion de particules radioactives) ou de contamination de la peau des personnes en cas de relâchement de substances radioactives hors de l’emballage ;
- la contamination de l’environnement dans le cas de relâchement de substances radioactives ;
- le démarrage d’une réaction nucléaire en chaîne non contrôlée (risque de criticité) pouvant occasionner une irradiation grave des personnes. Ce risque ne concerne que les substances fissiles ;
- le dégagement de chaleur important de certaines substances (par exemple le combustible irradié), qui peuvent entraîner des blessures pour les personnes à proximité ou endommager les composants du colis.
Par nature, des transports de substances radioactives, tout comme le transport d’autres matières dangereuses, ont lieu sur l’ensemble du territoire national et sont soumis à de nombreux éléments difficiles à contrôler ou à anticiper, comme par exemple les conditions climatiques ou le comportement des autres véhicules à proximité. On ne peut donc pas exclure la possibilité qu’un accident de transport se produise en tout point du territoire national, éventuellement à proximité immédiate des populations. Contrairement aux événements se déroulant au sein des installations nucléaires de base, le personnel des industriels concernés n’est généralement pas en mesure d’intervenir immédiatement, voire de donner l’alerte si le conducteur est sévèrement blessé dans l’accident.
Plusieurs facteurs font varier l’existence et l’ampleur des risques :
- la nature des substances radioactives transportées ;
- leur forme (solide, liquide, gazeuse) et de leur conditionnement (sous forme de poudre, de source radioactive scellée…) ;
- les quantités transportées dans un colis ;
- la conception de l’emballage et de la protection qu’il apporte ;
- le nombre de colis transportés dans un même moyen de transport (véhicule, wagon…)
Ainsi, le risque radiologique est très faible pour un « colis excepté » qui peut être transporté sans précautions particulières au-delà des précautions classiques de transport d’un quelconque colis alors qu’il est plus important pour un « colis de type B » (voir robustesse des colis).
Et le risque chimique ?
Outre le risque radiologique, les substances radioactives peuvent par ailleurs présenter un risque chimique. C’est le cas, par exemple :
- de l’uranium naturel, faiblement radioactif, et dont le risque prépondérant pour l’homme est lié à la nature chimique du composé, notamment en cas d’ingestion ;
- de l’hexafluorure d’uranium, utilisé dans le cadre de la fabrication des combustibles pour les centrales nucléaires, qui peut conduire, en cas de relâchement et de contact avec l’eau, à la formation d’acide fluorhydrique qui est un puissant agent corrosif et toxique.
Une réglementation spécifique
Pour faire face à ces risques, une réglementation spécifique a été mise en place pour encadrer les transports de substances radioactives. La sûreté repose sur une approche de défense en profondeur qui implique en premier lieu la robustesse des colis contenant les substances radioactives. Le colis doit être conçu, fabriqué et utilisé de manière à :
- assurer une protection contre les rayonnements ionisants émis par les substances, par exemple au moyen d’un blindage qui atténue suffisamment ces rayonnements ;
- empêcher le relâchement de substances, grâce à une enveloppe extérieure et un système de fermeture assurant l’étanchéité du colis ;
- empêcher l’occurrence d’une réaction nucléaire en chaîne si son contenu est constitué de matières fissiles, notamment en limitant le contenu et en restant étanche (car l’eau facilite le démarrage de ces réactions) ;
- le cas échéant, assurer une dissipation suffisante de la chaleur du contenu, par exemple aux moyens d’ailettes de refroidissement ;
- le cas échéant, assurer une protection contre les risques chimiques présentés par le contenu.
Ces fonctions de sûreté doivent être assurées y compris en cas d’incident ou d’accident, selon les enjeux présentés par le contenu du colis.
La réglementation applicable
Pour faire face aux risques qu’ils présentent, une réglementation spécifique a été mise en place pour encadrer les transports de substances radioactives. Étant donné que les transports peuvent franchir les frontières, cette réglementation repose sur des prescriptions à caractère international qui ont été élaborées par l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Elles sont regroupées dans le document nommé SSR-6, qui sert de base aux réglementations européenne et française sur le sujet.
L'Autorité de sûreté nucléaire s'attache donc à intervenir le plus en amont possible de l'élaboration de cette réglementation, notamment en participant au comité TRANSSC de l'AIEA, qui est impliqué dans la rédaction du SSR-6.
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Règlement de transport des matières radioactives de l’AIEA, prescriptions de sûreté particulières n°SSR-6 édition de 2018
Au niveau international, un comité d'experts du Conseil économique et social de l'ONU élabore le "règlement type de l’ONU" qui recense les recommandations pour le transport de marchandises dangereuses. Ces marchandises sont réparties en 9 classes en fonction du type de danger et les substances radioactives forment la classe n°7. Les recommandations spécifiques aux substances radioactives sont celles du SSR-6 de l’AIEA.
Les différentes classes de matières dangereuses
Classe 1 : matières et objets explosibles
Classe 2 : gaz comprimés, liquéfiés ou dissous
Classe 3 : liquides inflammables
Classe 4 : solides inflammables
Classe 5 : matières comburantes
Classe 6 : matières toxiques et infectieuses
Classe 7 : matières radioactives
Classe 8 : matières corrosives
Classe 9 : matières dangereuses diverses
Ces recommandations pour le transport de marchandises dangereuses sont par la suite transposées dans des annexes à divers accords internationaux par des organisations spécialisées par mode de transport :
Routier :
- La Commission économique des Nations Unies pour l'Europe (CEE/ONU à Genève) rédige l’Accord relatif au transport international des marchandises dangereuses par route (ADR)
Ferroviaire :
- L’Organisation intergouvernementale pour les transports internationaux ferroviaires (OTIF à Berne) rédige le Règlement concernant le transport international ferroviaire des marchandises dangereuses (RID)
Voies navigables intérieures :
- La Commission économique des nations unies pour l'Europe (CEE/ONU à Genève) rédige l’Accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par voies de navigation intérieure (ADN)
Aérien :
- L’Organisation de l'aviation civile internationale (OACI à Montréal) rédige les Instructions techniques pour la sécurité du transport aérien des marchandises dangereuses (« IT de l'OACI »)
Maritime :
- L’Organisation maritime internationale (OMI à Londres) rédige le Code maritime international des marchandises dangereuses et le Code maritime international des cargaisons solides en vrac.
Ces réglementations, dites « modales », sont ensuite transposées au niveau de l’Union européenne ainsi qu’en droit français et sont rendus applicables par divers textes juridiques. Par exemple, pour les transports par voies terrestres (route, chemins de fer, voies navigables intérieures) :
- la directive n°2008/68/CE du Parlement européen et du Conseil relative au transport intérieur des marchandises dangereuses ;
- l’arrêté du 29 mai 2009 relatif aux transports de marchandises dangereuses par voies terrestres (dit "arrêté TMD") ;
- le Code des transports, notamment ses articles L. 1252-1 et suivants.
- le Code de l’environnement, notamment son article L. 595-1
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La radioprotection dans les transports
La radioprotection des travailleurs et du public doit être une préoccupation constante lors des transports de substances radioactives à usage civil.
Comme le prévoient le code de la santé publique et le code du travail :
- une personne du public ou un travailleur non spécialisé ne doit pas être exposé à une dose efficace supérieure à 1 millisievert (mSv) par an, et
- un travailleur spécialisé ne doit pas être exposé à une dose efficace supérieure à 20 mSv par an, et
- le principe d’optimisation doit être appliqué, c’est-à-dire qu’il convient de réduire l’exposition aussi bas que raisonnablement possible en-dessous de ces limites.
Limites d’exposition à proximité d’un colis ou d’un véhicule
La radioprotection fait l’objet de prescriptions précises dans la réglementation applicable au transport de substances radioactives. Ainsi, la réglementation prévoit que :
- le débit de dose à la surface du colis ne doit pas dépasser 2 mSv/h. Cette limite peut cependant être portée à 10 mSv/h en « utilisation exclusive » [1] car l’expéditeur ou le destinataire peuvent alors donner des consignes spécifiques pour limiter la présence à proximité du colis ;
- pour les transports par route et voie ferrée, dans tous les cas, le débit de dose ne doit pas dépasser 2 mSv/h au contact du véhicule (ou du wagon) et doit être inférieure à 0,1 mSv/h à 2 mètres du véhicule (ou du wagon).
Ainsi, en supposant qu’un véhicule de transport atteigne la limite de 0,1 mSv/h à 2 mètres, une personne devrait séjourner 10 heures en continu à deux mètres du véhicule avant que la dose reçue atteigne la limite annuelle d’exposition applicable à une personne du public.
Limites de contamination sur les colis
La réglementation fixe de plus une limite sur le niveau de contamination des surfaces externes des colis. Il doit être inférieur à 4 Bq/cm2 en général et 0,4 Bq/cm2 pour les radioéléments émettant des particules alpha de haute énergie (qui sont particulièrement nocives).
Le millisievert (mSv)
Le sievert (Sv) est l’unité légale d'équivalent de dose qui permet de rendre compte de l'effet biologique produit par une dose absorbée donnée sur un organisme vivant. Pour les faibles doses, on utilise le millisievert (symbole mSv) qui représente un millième de sievert et le microsievert (symbole µSv) qui représente un millionième de sievert.
Voici quelques ordres de grandeur :
• la radioactivité naturelle moyenne en France :
2,9 mSv par an et par personne,
• une radiographie pulmonaire :
environ 0,1 mSv,
• un aller-retour Paris-New York :
entre 0,05 et 0,15 mSv.
Pour en savoir plus :
Programme de protection radiologique
Ces limites sont complétées par des exigences relatives à l’organisation de la radioprotection au sein des entreprises. Ainsi, les entreprises intervenant dans les opérations de transport doivent mettre en place un programme de protection radiologique, qui regroupe les dispositions prises pour protéger les travailleurs et le public des risques liés à l’exposition aux rayonnements ionisants. Ce programme repose notamment sur une évaluation des doses susceptibles d’être reçues par les travailleurs et le public.
En fonction des résultats de cette évaluation, des actions d’optimisation doivent être mises en place pour rendre ces doses aussi basses que raisonnablement possible (principe ALARA). Par exemple, des chariots plombés peuvent être mis à disposition des manutentionnaires pour réduire leur exposition. L’évaluation de dose des travailleurs permet également de décider de la mise en place d’une dosimétrie pour mesurer la dose reçue, s’il est estimé que celle-ci risque de dépasser 1 mSv/an.
Enfin, l’ensemble des acteurs du transport doivent être formés et sensibilisés aux risques liés aux rayonnements afin d’avoir conscience de la nature des risques, de la manière de s’en protéger et de protéger les autres.
[1] L’utilisation exclusive correspond au cas où le véhicule est utilisé par un seul expéditeur et où toutes les opérations de transport se font conformément aux instructions de l’expéditeur ou du destinataire
Les actions de l’ASN dans le domaine des transports
L’ASN est l’autorité compétente française pour le contrôle de la sûreté et de la radioprotection des transports de substances radioactives à usage civil [1], ce qui comprend les dispositions prises en vue de la prévention des accidents et de la limitation de leurs conséquences sur les personnes et l’environnement. En revanche, les risques de vol, d’attentats, de sabotage ou de détournements à des fins malveillantes de matières nucléaires ne sont pas du ressort de l’ASN mais du Haut Fonctionnaire de défense et de sécurité (HFDS) du ministère en charge de l’environnement.
L’ASN a 5 missions dans le domaine des transports de substances radioactives à usage civil :
1. Délivrer les certificats d’agrément et d’approbation d’expédition
Les agréments émis par l’ASN
Les colis présentant les enjeux les plus importants en matière de sûreté nucléaire et de radioprotection, c’est-à-dire les colis de types B et C, ainsi que les colis contenant des matières fissiles et ceux contenant plus de 0,1 kg d’UF6, doivent avoir reçu un agrément de l’ASN pour pouvoir être transportés. Les concepteurs des modèles de colis qui sollicitent l’agrément auprès de l’ASN doivent fournir en appui de leur demande un dossier de sûreté permettant de démontrer la conformité de leur modèle de colis à l’ensemble des prescriptions réglementaires. Pour statuer sur une demande d’agrément, l’ASN instruit ce dossier, en s’appuyant sur l’expertise de l’IRSN, afin de vérifier que la démonstration est appropriée. L’agrément comporte une durée de validité. Le cas échéant, la délivrance de l’agrément est accompagnée de demandes de compléments visant à améliorer certains points de la démonstration de sûreté qui sera soumise lors de la demande de renouvellement de l’agrément. Dans certains cas, l’expertise de l’IRSN est complétée par une réunion du Groupe permanent d’experts « transport » (GPT). Les avis des Groupes permanents d’experts sont systématiquement publiés sur le site Internet de l'ASN.
L’agrément précise les conditions de fabrication, d’utilisation et de maintenance du colis de transport. Il est délivré pour un modèle de colis indépendamment du transport à proprement parler, pour la réalisation duquel aucun accord ou avis préalable n’est en général requis de l’ASN.
Les expéditions « sous arrangement spécial »
Dans le cas où un colis ne peut pas satisfaire à certaines prescriptions réglementaires, la réglementation prévoit néanmoins la possibilité de réaliser son transport en effectuant une expédition « sous arrangement spécial ». L’expéditeur doit alors définir des mesures compensatoires permettant de garantir un niveau de sûreté équivalent à celui qui aurait été obtenu si ces prescriptions réglementaires avaient été satisfaites. Par exemple, s’il n’est pas complétement démontré qu’un colis résiste à un incendie durant 30 min, une mesure compensatoire peut être de faire accompagner le transport par un véhicule d’escorte contenant des extincteurs en nombre suffisant. En cas d’accident, le feu pourrait ainsi être attaqué sans tarder et l’alerte donnée plus rapidement. Une expédition sous arrangement spécial ne peut se faire qu’avec l’accord explicite de l’autorité compétente, qui émet alors un certificat d’approbation d’expédition sous arrangement spécial. Ce certificat indique les mesures compensatoires à appliquer.
La reconnaissance d’agréments émis par des autorités étrangères
Dans le cas de certificats d’agrément émis par les autorités étrangères, la réglementation internationale prévoit leur reconnaissance en France soit de manière automatique, soit par l’émission d’un certificat français distinct de celui d’origine, en fonction du type de colis.
Délivrance des certificats
Les certificats sont délivrés en général pour une période de cinq ans. On compte aujourd’hui une cinquantaine de demandes de certificat par an déposées auprès de l’ASN, toutes causes confondues (agrément initial, renouvellement, modification, validation, approbation d’expédition…).
2. Contrôler toutes les étapes de la vie d’un colis
Toutes les étapes de la vie d’un colis, de la fabrication et la maintenance d’un emballage, à la préparation des colis en vue des transports, leur expédition, leur acheminement et leur réception sont soumises au contrôle de l’ASN. Ce contrôle s’effectue principalement par des inspections menées sur site, mais également par l’instruction des comptes rendus d’événements significatifs affectant le transport [2].
Les inspections
L’ASN réalise plus d’une centaine d’inspections par an dans le domaine du transport. Ces inspections portent notamment sur :
- la fabrication des colis, afin de vérifier que les colis réellement fabriqués sont conformes aux exigences réglementaires (notamment la résistance aux épreuves applicables). Ces inspections concernent principalement les colis agréés par l’ASN. La fabrication des colis non soumis à agrément, qui présentent moins d’enjeux mais sont plus nombreux, fait également l’objet de certaines inspections ;
- la maintenance des colis, afin de vérifier le respect des prescriptions garantissant le maintien en bon état du colis même après un usage répété. Là encore, ces inspections concernent principalement les colis agréés par l’ASN mais visent également parfois des colis non soumis à agrément ;
- l’expédition et le transport, afin de vérifier le respect des exigences réglementaires incombant à chacun des acteurs du transport, notamment l’expéditeur et le transporteur, à savoir le respect des exigences du certificat d’agrément du colis, la formation des intervenants, la mise en œuvre d’un programme de protection radiologique, le bon arrimage des colis, les mesures de débit de dose et de contamination, la conformité documentaire, la mise en œuvre d’un programme d’assurance de la qualité, etc.
Les événements significatifs
La réglementation impose que les événements affectant les transports de substances radioactives qui sont considérés comme significatifs du point de vue de la sûreté soient déclarés à l’ASN sous 4 jours ouvrés selon les modalités de son Guide n° 31 relatif à la déclaration des événements, comme demandé dans l’article 7 de l’arrêté du 29 mai 2009 modifié relatif aux transports de marchandises dangereuses par voies terrestres. Une analyse détaillée des causes profondes de l’événement et des actions correctives à mettre en œuvre pour en prévenir le renouvellement doit ensuite être effectuée et transmise à l’ASN sous la forme d’un compte-rendu dans les deux mois qui suivent la déclaration. L’ASN instruit systématiquement ces comptes rendus pour évaluer la pertinence de l’analyse menée et l’adéquation des actions correctives.
L’objectif de ce dispositif est de permettre à l’ASN de faire progresser la sûreté des transports en France, par exemple en identifiant d’éventuelles tendances révélatrices d’une dégradation dans un domaine ou des bonnes pratiques à encourager, en repérant des anomalies ou causes récurrentes dans les différents événements. Cela permet ensuite à l’ASN d’engager des actions de long terme pour améliorer la situation, soit en renforçant la réglementation, soit en ciblant des inspections sur certains points, soit en publiant des guides pour préciser l’application de la réglementation ou attirer l’attention des professionnels sur certaines problématiques.
Par ailleurs, l’ASN agrée, après avis de la sous-commission permanente chargée du transport des marchandises dangereuses au sein du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques (CSPRT) :
- les organismes de formation des conducteurs de véhicules effectuant le transport de matières radioactives ; deux organismes sont agréés ;
- les organismes chargés d’attester la conformité des emballages conçus pour contenir 0,1 kilogramme ou plus d’UF6 (hexafluorure d’uranium) ;
- les organismes chargés de l’homologation de type de conteneurs‑citernes et caisses mobiles citernes destinés au transport des marchandises dangereuses de la classe 7 ;
- les organismes chargés des contrôles initiaux et périodiques des citernes destinées au transport de marchandises dangereuses de la classe 7.
Deux organismes sont agréés pour l’homologation des conteneurs‑citernes et l’attestation de conformité des emballages d’UF6.
3. Participer à l’élaboration de la réglementation nationale et internationale
La réglementation encadrant le transport de substances radioactives découle largement des recommandations élaborées au sein de l’Agence internationale à l’énergie atomique (AIEA). L’ASN participe au comité de cette agence chargé d’examiner ces recommandations et prend donc part aux discussions internationales portant sur leurs évolutions potentielles.
Au niveau national, ces recommandations sont déclinées en droit français pour les transports par voies terrestres par l’arrêté du 29 mai 2009 modifié, dit « arrêté TMD ». Le code des transports prévoit que l’ASN doit être consultée avant toute modification de cet arrêté pouvant concerner le transport des substances radioactives. L’ASN siège également à la sous-commission permanente chargée du transport des marchandises dangereuses au sein du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques (CSPRT), qui est appelée à donner son avis sur tout projet de réglementation sur les transports par voies terrestres.
Enfin, l’ASN peut prendre dans le domaine des transports des décisions pour compléter les modalités d’application de la réglementation. Une fois ces décisions homologuées par un arrêté du ministre compétent, elles deviennent juridiquement contraignantes. Par exemple, l’ASN a pris en 2015 une décision imposant aux entreprises réalisant des transports de substances radioactives à se déclarer auprès de l’ASN.
4. Assister les pouvoirs publics en cas d’accident de transport de substances radioactives
La gestion des accidents de transport de substances radioactives implique à la fois les pouvoirs publics et les acteurs industriels du transport. Vis-à-vis des premiers, l’ASN a une mission d’appui technique en cas d’accident de transport. Afin de la remplir au mieux, l’ASN œuvre à la préparation des pouvoirs publics, notamment en contribuant à l’organisation régulière d’exercices nationaux sur le thème du transport.
De plus, la réglementation prévoit des obligations pour les différents acteurs industriels du domaine du transport, en particulier la transmission de l’alerte et l’appui aux pouvoirs publics en cas d’accident. Vis-à-vis de ces acteurs, l’ASN joue son rôle d’autorité et contrôle qu’ils remplissent leurs obligations réglementaires, ce qui implique qu’ils se préparent à l’avance afin d’être en mesure de réagir efficacement dans le cas d’un accident de transport. L’ASN estime que les acteurs industriels devraient dans ce but mettre en place des plans d’urgence, comme indiqué dans le guide n°17 de l’ASN. Chaque année, l’ASN conduit plusieurs inspections chez des expéditeurs et des transporteurs pour contrôler l’efficacité de leur préparation aux situations d’urgence.
5. Contribuer à l’information du public
Au titre de l’article L. 125-10 du code de l’environnement, les responsables de transports doivent communiquer à tout citoyen en exprimant la demande les informations relatives aux risques présentés, dès lors que les colis mis en jeu sont soumis à un agrément de l’ASN ou que le transport est soumis à une approbation d’expédition de l’ASN, ce qui inclut les expéditions « sous arrangement spécial ». La Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) peut être saisie pour avis, préalablement à tout recours contentieux, par une personne à qui est opposé un refus de communication de la part d’un responsable de transport.
La loi limite cependant dans certains cas ce droit d’accès aux informations, notamment si elles peuvent porter atteinte à la sûreté de l’État ou à la sécurité publique. Par exemple, les itinéraires suivis par les transports ne peuvent pas être rendus publics afin de ne pas favoriser d’éventuels actes de malveillance. Cela n’empêche pas les pouvoirs publics, dont l’ASN, d’informer le public des principaux flux de transport de substances radioactives, de leurs risques et des exigences réglementaires associées.
À l’occasion de plusieurs transports internationaux organisés au cours de l’année 2011, un intérêt grandissant du public et des médias pour les transports de substances radioactives a été constaté. L’ASN a par conséquent développé l’information mise à disposition du public dans le domaine de la sûreté des transports de substances radioactives, principalement sur son site Internet. Le rapport annuel de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection comporte également un chapitre dédié au transport.
Par ailleurs, comme dans ses autres domaines de compétence, l’ASN publie systématiquement les lettres envoyées aux industriels à la suite de ses inspections, les avis d’incident pour tous les événements classés au moins au niveau 1 de l’échelle INES.
Enfin, l’ASN organise des consultations du public sur ses projets de décisions et de guides à destination des professionnels.
En savoir plus :
[1] Le Délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités intéressant la défense (DSND) assure ce rôle pour les transports liés à la défense nationale.
[2] Ces événements doivent être déclarés à l’ASN et faire l’objet d’un compte-rendu détaillant leurs causes et les enseignements tirés. Le guide de l’ASN n°31 détaille les critères permettant d’identifier les événements à déclarer à l’ASN ainsi que les modalités de déclaration.
Principes de sûreté pour le transport de substances radioactives - La robustesse du colis
La sûreté des transports, comme la sûreté des installations, est fondée sur une approche de défense en profondeur, qui consiste à mettre en œuvre plusieurs niveaux de protection, techniques ou organisationnels, afin de garantir la sûreté du public, des travailleurs et de l’environnement, tant en situation de routine qu’en cas d’incident ou d’accident.
Les colis contenant les substances radioactives doivent assurer les fonctions de sûreté suivantes :
- assurer une protection contre les rayonnements ionisants émis par ces substances, par exemple au moyen d’un blindage qui atténue grandement ces rayonnements ;
- empêcher le relâchement ces substances hors du colis, grâce à une enveloppe extérieure et un système de fermeture assurant l’étanchéité du colis ;
- empêcher l’occurrence d’une réaction nucléaire en chaîne si son contenu est constitué de matières fissiles, notamment en limitant le contenu et en restant étanche (car l’eau facilite le démarrage de ces réactions) ;
- le cas échéant, assurer la protection contre le dégagement thermique important du contenu, par exemple aux moyens d’ailettes de refroidissement ;
- le cas échéant, assurer une protection contre les risques chimiques présentés par le contenu.
Un accident de transport pouvant a priori survenir n’importe où, donc potentiellement loin des services de secours spécialisés, le colis doit par lui-même apporter une protection suffisante pour limiter les conséquences d’un accident. Le premier niveau de protection de la défense en profondeur est donc la robustesse du colis, qui doit permettre d’assurer un maintien des fonctions de sûreté, y compris en cas d’accident sévère si les enjeux de sûreté l’exigent.
La réglementation définit donc des épreuves, qui simulent des incidents ou des accidents, à l’issue desquelles le colis doit maintenir ses fonctions de sûreté. La sévérité des épreuves réglementaires est proportionnée au danger potentiel du contenu transporté. Cinq grandes familles de colis sont ainsi définies : colis « exceptés », colis « de type industriel », colis « de type A », colis « de type B », colis « de type C ». Ces familles sont déterminées en fonction des caractéristiques de la matière transportée comme l’activité radiologique totale, l’activité spécifique (qui correspond au caractère plus ou moins concentré de la matière), sa forme physico-chimique. De plus, des exigences supplémentaires s’appliquent aux colis transportant de l’hexafluorure d’uranium ou des matières fissiles, du fait des risques spécifiques présentés par ces substances.
Les colis exceptés
Les colis exceptés permettent de transporter des quantités très faibles de substances radioactives, comme les produits radio-pharmaceutiques de très faible activité. Du fait des enjeux de sûreté très faibles, ces colis ne sont soumis à aucune épreuve de qualification. Ils doivent toutefois respecter un certain nombre de spécifications générales, notamment relatives à la radioprotection, pour garantir que l’irradiation autour des colis exceptés reste très faible (moins de 5 µSv/h).
Du fait de leurs enjeux très faibles, les colis exceptés ne font pas l’objet d’un agrément par l’ASN.
Les colis de type A et les colis industriels non fissiles
Les colis de type A permettent, par exemple, de transporter des radionucléides à usage médical couramment utilisés dans les services de médecine nucléaire, comme les générateurs de technétium. L’activité totale pouvant être contenue dans un colis de type A est limitée par la réglementation.
Les colis de type A doivent être conçus pour résister aux aléas pouvant être rencontrés lors du transport ou des opérations de manutention ou d’entreposage (petits chocs, empilement des colis, chute d’un objet perforant sur le colis, exposition à la pluie). Ces situations sont simulées par les épreuves suivantes :
- exposition à un orage important (hauteur de précipitation de 5 cm par heure pendant au moins une heure) ;
- chute sur une surface indéformable d’une hauteur variable selon la masse du colis (entre 0,30 et 1,20 m) ;
- compression équivalente à 5 fois la masse du colis ;
- pénétration d’une barre standard par chute d’une hauteur de 1 m sur le colis.
Des épreuves supplémentaires sont nécessaires si le colis contient des substances radioactives sous forme liquide ou gazeuse.
Les colis industriels permettent de transporter de la matière avec une faible concentration d’activité ou des objets ayant une contamination surfacique limitée. Les matières uranifères extraites à l’étranger de mines d’uranium sont, par exemple, acheminées en France à l’aide de fûts industriels de 200 litres chargés dans des colis industriels. Trois sous-catégories de colis industriels existent en fonction de la dangerosité du contenu. Selon leur sous-catégorie, les colis industriels sont soumis aux mêmes épreuves que les colis de type A, à une partie d’entre elles ou seulement aux dispositions générales applicables aux colis exceptés.
Du fait de leurs enjeux limités, les colis industriels et de type A ne font pas l’objet d’un agrément par l’ASN : la conception et la réalisation des épreuves relèvent de la responsabilité du fabricant. Ces colis et leurs dossiers de démonstration de sûreté peuvent être contrôlés par l’ASN lors d’inspections.
Les colis de type B et les colis fissiles
Les colis de type B sont les colis permettant de transporter les substances les plus radioactives, comme par exemple les combustibles usés provenant des centrales nucléaires et les déchets nucléaires vitrifiés de haute activité provenant de l’usine de retraitement de La Hague. Les appareils de gammagraphie, utilisés notamment pour le contrôle des soudures, relèvent également de la catégorie des colis de type B.
Les colis contenant des matières fissiles sont des colis de type industriel, A ou B qui sont de plus conçus pour transporter des matières contenant de l’uranium 235 ou du plutonium et présentant de ce fait un risque de démarrage d’une réaction nucléaire en chaîne incontrôlée (risque de criticité). Il s’agit essentiellement de colis utilisés par l’industrie nucléaire.
Compte-tenu du niveau de risque élevé présenté par les colis de type B et les colis contenant des matières fissiles, la réglementation impose qu’ils subissent des épreuves simulant des conditions accidentelles sévères :
- une épreuve de chute de 9 m de haut sur une cible indéformable. Le fait que la cible soit indéformable signifie que toute l’énergie de la chute est absorbée par le colis, ce qui est très pénalisant. En effet, si un colis lourd chute lors d’un transport, le sol se déformera et absorbera donc une partie de l’énergie. Ainsi, une chute sur une cible indéformable de 9 m peut donc correspondre à une chute d’une hauteur nettement plus élevée sur un sol qui se déformera.
- Cette épreuve permet également de simuler le cas où le véhicule percuterait un obstacle. Lors de la chute libre de 9 m, le colis arrive à environ 50 km/h sur la cible. Cependant, cela correspond à un choc réel à plus grande vitesse car, dans la réalité, le véhicule et l’obstacle absorberaient tous deux une partie de l’énergie.
- une épreuve de poinçonnement : le colis est lâché depuis 1 m de hauteur sur un poinçon métallique. Le but est de simuler l’agression du colis par des objets perforants (par exemple des débris arrachés au véhicule lors d’un accident).
- une épreuve d’incendie de 800 °C pendant 30 min. Cette épreuve simule le fait que le véhicule puisse prendre feu après un accident.
- une épreuve d’immersion sous 15 m d’eau pendant 8 heures. Cette épreuve permet de tester la résistance à la pression, pour le cas où le colis tomberait dans de l’eau (dans un fleuve en bord de route ou dans un port lors du déchargement d’un navire). Certains colis de type B doivent de plus subir une épreuve poussée d’immersion (sous 200 m d’eau pendant une heure).
Les trois premières épreuves (chute, poinçonnement et incendie) doivent être réalisées successivement sur le même spécimen de colis. Elles doivent être réalisées dans la configuration la plus pénalisante (orientation du colis, température extérieure, position du contenu, etc.). Cet enchaînement d’un choc sévère suivi d’une agression par un outil perforant puis d’un incendie violent vise à couvrir un accident du type collision violente avec un camion-citerne d’essence. Ces épreuves sont sévères et permettent donc de couvrir la majorité des accidents envisageables.
Diverses études ont parfois été réalisées pour étudier des agressions différentes de celles retenues pour les épreuves réglementaire (par exemple modélisation d’une chute de 25 m sur du béton, expérience avec collision d’un train à 160 km/h sur un colis, etc.). Elles confirment que la chute de 9 m sur cible indéformable est plus sévère que les chutes et collisions étudiées.
Le critère de réussite de chaque épreuve dépend du type de colis considéré :
- les risques présentés par un colis de type B sont liés à l’activité importante de son contenu. Le critère de succès pour un colis de type B est donc que ses fonctions de confinement de la matière radioactive et de protection radiologique soient maintenues à l’issue des épreuves.
- pour un colis contenant des matières fissiles, le risque est le démarrage d’une réaction nucléaire en chaîne incontrôlée. Pour ce type de colis, le critère de succès est donc l’absence de démarrage d’une telle réaction à l’issue des épreuves.
Si un colis relève des deux catégories, il devra respecter les deux types de critères.
L’activité du contenu d’un colis de type B n’est pas limitée par la réglementation. Cependant, plus cette activité est élevée, plus le colis doit être résistant pour réussir les épreuves car les critères de succès correspondent à des limites chiffrées, en valeurs absolues, sur le débit de dose et l’activité relâchée. Ainsi, plus l’activité du contenu est élevée, plus les protections mécaniques, thermiques et radiologiques du colis doivent être efficaces pour respecter ces critères.
Les modèles de colis de type B et ceux contenant des matières fissiles doivent recevoir un agrément de l’ASN, ou d’une autorité compétente étrangère, pour être autorisés à circuler. Pour obtenir cet agrément, le concepteur du modèle de colis doit démontrer dans le dossier de sûreté la résistance aux épreuves mentionnées ci-dessous. Cette démonstration est habituellement apportée au moyen d’épreuves réalisées sur une maquette représentant le colis, de modélisations/calculs numériques.
Les colis contenant de l’hexafluorure d’uranium
L’hexafluorure d’uranium, ou UF6, est utilisé dans le cycle du combustible. C’est sous cette forme que l’uranium est enrichi. On trouve donc de l’UF6 naturel (i.e. formé à partir d’uranium naturel), enrichi (i.e. avec une composition isotopique enrichie en U 235) ou appauvri. L’UF6 enrichi est fissile et les colis en contenant sont donc également soumis aux prescriptions présentées ci-dessus.
Outre les dangers présentés du fait de sa radioactivité, voire de son caractère fissile, l’UF6 présente aussi un fort risque chimique. La réglementation prévoit donc des prescriptions particulières pour les colis d’UF6. Ils doivent satisfaire aux dispositions de la norme ISO 7195, qui régit la conception, la fabrication et l’utilisation des colis. Ces colis sont aussi soumis à trois épreuves :
- une épreuve de chute libre entre 0,3 m et 1,2 m (selon la masse) sur cible indéformable ;
- une épreuve thermique, avec un feu de 800 °C durant 30 min ;
- une épreuve de tenue hydrostatique à 27,6 bars.
L’UF6 est transporté dans des cylindres métalliques. Dans le cas de l’UF6 enrichi, ce cylindre est transporté dans un suremballage dit « coque de protection », qui fournit la protection additionnelle nécessaire pour résister aux épreuves applicables aux colis contenant des matières fissiles. Les colis contenant de l’UF6 doivent également obtenir un agrément de l’ASN, ou d’une autorité compétente étrangère, pour être autorisés à circuler.
Les colis de type C
Les colis de type C sont destinés à transporter des substances hautement radioactives par voie aérienne. À ce jour, il n’existe en France aucun agrément pour des colis de type C à usage civil.
Répartition des colis transportés par type [1]
[1] Chiffres issus de l’enquête de l’ASN réalisée en 2011
| Type de colis | Part approximative des colis transportés annuellement |
---|---|---|
Colis agréés par l’ASN | Colis de type B, colis contenant des matières fissiles et colis contenant de l’UF6 | 2 % |
Colis non soumis à l’agrément de l’ASN | Colis de type A ne contenant pas de substances radioactives fissiles | 32 % |
Colis industriels ne contenant pas de substances radioactives fissiles | 8 % | |
Colis exceptés | 58 % |
Principes de sûreté pour le transport de substances radioactives - La fiabilité des opérations de transport
La sûreté des transports de substances radioactives à usage civil, comme la sûreté des installations nucléaires, est fondée sur une approche de défense en profondeur, qui consiste à mettre en œuvre plusieurs niveaux de protection, techniques ou organisationnels, afin de garantir la sûreté du public, des travailleurs et de l’environnement, en situations de routine, d’incident et d’accident.
La fiabilité des opérations de transport, qui permet de réduire l’occurrence des anomalies, des incidents et des accidents, constitue le deuxième niveau de protection de cette approche. La réglementation prévoit des obligations applicables par les différents acteurs d’un transport pour assurer cette fiabilité, en particulier :
• la formation des différents opérateurs :
Les opérateurs intervenant lors des différentes phases du transport, depuis le chargement du contenu dans le colis chez l’expéditeur jusqu’au déchargement chez le destinataire, doivent être formés selon leurs fonctions et leurs responsabilités. Cette formation doit notamment traiter des actions à mener en cas d’accident. Cette exigence est fondamentale pour s’assurer que les opérateurs connaissent les enjeux de sûreté des transports de substances radioactives et les dispositions concrètes à appliquer. Les opérateurs doivent également être formés à la radioprotection, pour connaître les précautions à prendre afin de limiter au maximum l’exposition aux rayonnements ionisants, tant pour eux-mêmes que pour autrui.
De plus, les conducteurs des véhicules routiers doivent également suivre une formation spécifique délivrée par un organisme agréé par l’ASN et se concluant par un examen sanctionné par un certificat . Sans ce certificat, une personne n’est pas autorisée à conduite un véhicule transportant des substances radioactives en quantité notable.
• la mise en place d’un système d’assurance de la qualité pour toutes les opérations :
Tous les acteurs du transport (expéditeurs, transporteurs, destinataires, mais aussi fabricants de colis et opérateurs de maintenance) doivent mettre en place un système d’assurance qualité, c’est-à-dire une organisation permettant de s’assurer du respect des exigences réglementaires. Cela consiste par exemple à contrôler les opérations importantes pour la sûreté, éventuellement par un opérateur différent de celui qui a réalisé l’opération, à mettre en place des « check-lists » pour que les opérateurs n’oublient aucune étape, à étudier les postes de travail pour s’assurer que les opérateurs puissent accomplir leurs tâches dans des conditions satisfaisantes, à mettre à leur disposition des outils de mesure étalonnés et adaptés, etc.
Les actions mises en place au titre de ce système d’assurance de la qualité doivent être décrites dans des procédures et les résultats des différents contrôles effectués doit être conservés. Ces dispositions permettent à l’ASN de contrôler a posteriori la bonne mise en œuvre du système lors de ses inspections.
• le respect des conditions d’utilisation des colis :
Les concepteurs des modèles de colis doivent définir des conditions d’utilisation permettant de respecter les exigences réglementaires (notamment la résistance aux épreuves). Les utilisateurs des colis sont tenus de respecter ces conditions d’utilisation.
Cela couvre toutes les opérations importantes, comme par exemple la fermeture des colis (les conditions indiquent les couples de serrage des vis, la nécessité ou non de mettre le colis en dépression, le type de joint à utiliser, etc.), ainsi que les instructions pour la maintenance des colis.
Dans le cas des colis agréés par l’ASN, le certificat d’agrément peut contenir des prescriptions de l’ASN venant compléter les conditions d’utilisation.
• l’arrimage efficace des colis :
Même si certains colis sont conçus pour résister à des chocs importants, la réglementation impose que les colis soient arrimés solidement durant leur transport afin d’éviter tout choc. De plus, un mauvais arrimage pourrait conduire à une augmentation du débit de dose près du véhicule, si le colis s’est déplacé contre une paroi en cours de transport.
• la signalisation des colis et des véhicules :
Afin que les travailleurs puissent être informés du niveau de risque présenté par chaque colis, la réglementation impose que les colis soient étiquetés. Les étiquettes sont de trois types, qui correspondent à différents niveaux de débit de dose au contact et à 1 m du colis. Les travailleurs intervenant à proximité du colis ont ainsi un moyen visuel de savoir quels sont les colis engendrant les débits de dose les plus importants et peuvent limiter leur temps à proximité de ceux-ci ou les éloigner.
En raison du risque de criticité (démarrage d’une réaction nucléaire en chaîne), les colis contenant des matières fissiles doivent être éloignés les uns des autres. Ils portent donc une étiquette spécifique, qui permet de vérifier facilement le respect de cette prescription.
Enfin, les colis doivent être marqués, avec notamment leur type (type A, type B…), l’adresse de l’expéditeur ou du destinataire et un numéro d’identification. Cela permet d’avoir une estimation du risque présenté par le colis, de pouvoir identifier le colis en cas de perte et d’éviter les erreurs de livraison.
Les véhicules transportant les colis de substances radioactives doivent également avoir une signalisation spécifique. Comme tous les véhicules transportant des marchandises dangereuses, ils portent une plaque orange à l’avant et à l’arrière. De plus, ils doivent revêtir une plaque-étiquette présentant un trèfle et la mention « RADIOACTIVE ». L’objectif de la signalisation des véhicules est de guider l’action des services de secours en cas d’accident.
Les responsabilités des différents acteurs du transport
Outre ces prescriptions générales, des exigences particulières sont également applicables aux différents acteurs en fonction de leur rôle dans le transport :
- L’expéditeur est responsable de remettre au transporteur un colis conforme aux exigences réglementaires. Il doit en particulier s’assurer que la matière est autorisée au transport, vérifier que le colis est adapté à son contenu, utiliser un colis en bon état et agréé (si besoin), effectuer les mesures de débit de dose et de contamination et étiqueter le colis.
- Le chargeur est responsable du chargement du colis dans le véhicule et de son arrimage conformément aux instructions spécifiques de l’expéditeur et aux règles de l’art.
- Le transporteur a la charge du bon déroulement de l’acheminement. Il doit notamment veiller au bon état du véhicule, à la présence de l’équipement de bord (extincteurs, équipements de protection individuelle du conducteur, etc.), au respect des limites de débit de dose autour du véhicule et à l’apposition des plaques orange et plaques-étiquettes.
- Le concepteur du modèle de colis doit avoir conçu et dimensionné l’emballage en fonction des conditions d’utilisation et de la réglementation. Pour les colis de type B ou fissiles, il doit obtenir un agrément de l’ASN.
- Le fabriquant doit réaliser l’emballage conformément à la description qui en est faite par le concepteur.
- Le transport peut être organisé par un commissionnaire de transport. Celui-là est chargé, pour le compte de l’expéditeur ou du destinataire, d’obtenir toutes les autorisations nécessaires et d’envoyer les différents préavis. Il doit aussi sélectionner le moyen de transport, la société de transport et l’itinéraire en fonction des exigences réglementaires.
- Le destinataire a l’obligation de ne pas différer, sans motif impératif, l’acceptation de la marchandise et de vérifier, après le déchargement, que les prescriptions le concernant sont bien respectées. Il doit notamment effectuer des mesures de débit de dose sur le colis après réception pour détecter un éventuel problème qui aurait pu survenir au cours du transport.
- Le propriétaire des colis doit mettre en place un système de maintenance conforme à ce qui est décrit dans le dossier de sûreté et le certificat d’agrément, afin de garantir le maintien en bon état des éléments importants pour la sûreté.
Déclaration des transporteurs
L’ASN a adopté en 2015 une décision instaurant, à compter de 2016, une obligation de déclaration pour toutes les entreprises réalisant en France des opérations de transport de substances radioactives.
Les informations obtenues au travers de la déclaration permettent à l’ASN notamment de disposer des moyens de contacter l’entreprise, y compris en cas d’urgence, de pouvoir estimer la nature et le volume de l’activité et de connaître les lieux de chargement, déchargement et entreposage en transit des colis. Cela permet ainsi de mieux cibler les contrôles de l’ASN.
Principes de sûreté pour le transport de substances radioactives - La gestion des situations d’urgence
La sûreté des transports de substances radioactives à usage civil, comme la sûreté des installations nucléaires, est fondée sur l’approche de défense en profondeur, qui consiste à mettre en œuvre plusieurs niveaux de protection, techniques ou organisationnels, afin de garantir la sûreté du public, des travailleurs et de l’environnement, en situations de routine, d’incident et d’accident.
La gestion des situations d’urgence est le dernier niveau de cette approche. En cas d’accident impliquant un transport de substances radioactives, elle doit permettre d’en limiter les conséquences sur les personnes et l’environnement.
Un accident de transport pouvant avoir lieu n’importe où sur le territoire, il est vraisemblable que les premiers services de secours arrivant sur les lieux n’aient pas de formation spécifique au risque radiologique et que la population à proximité ne soit pas sensibilisée à ce risque.
Dispositions générales
À ce titre, la réglementation prévoit des obligations pour les différents acteurs industriels du domaine du transport, notamment :
- Tous les intervenants doivent alerter immédiatement les services de secours en cas d’accident. Cela vaut notamment pour le conducteur du véhicule, qui sera a priori le premier informé. Il doit également transmettre l’alerte à l’expéditeur.
- L’équipage du véhicule doit avoir à sa disposition dans la cabine des consignes écrites indiquant notamment les premières actions à mener en cas d’accident (par exemple, activer le coupe-circuit si le véhicule en est équipé pour éviter le démarrage d’un incendie).
- Une fois l’alerte donnée, les intervenants doivent se mettre à disposition des pouvoirs publics pour aider aux actions de secours, notamment en fournissant toutes les informations pertinentes à leur disposition. Cela concerne particulier le transporteur et l’expéditeur, dont la connaissance du colis et de son contenu est précieuse pour mettre en place les dispositions adaptées.
Pour remplir ces obligations réglementaires, l’ASN recommande que les intervenants établissent des plans d’urgence permettant de définir à l’avance une organisation et des outils qui leur permettront de réagir efficacement en cas d’accident.
Il pourrait arriver que le conducteur soit dans l’incapacité de donner l’alerte, par exemple s’il est gravement blessé lors de l’accident. Dans ce cas, ce serait aux premiers services de secours de reconnaître la nature radioactive du chargement. Dans ce but, les plaques orange présentes sur les véhicules permettent de signaler la présence de marchandises dangereuses : les services de secours ont alors la consigne de faire évacuer par principe une zone de 100 m de rayon autour du véhicule, en attendant de connaître plus précisément le chargement et l’état des colis. La présence de plaques-étiquettes portant un trèfle montre le caractère radioactif du contenu, ce qui permettrait de transmettre cette information à la préfecture et aux autres acteurs spécialisés, notamment l’ASN.
Cas des accidents qui nécessiteraient l’activation de l’organisation nationale de crise
Si la nature de l’accident le justifie, le préfet commandera les opérations de secours. En attendant que les experts nationaux soient en mesure de lui apporter des conseils, le préfet pourrait s’appuyer sur le plan départemental d’urgence mis en place pour faire face à ses situations. Ce plan comporte notamment des fiches élaborées par l’ASN et l’IRSN détaillant les premières actions à mener en fonction du type de colis impliqué dans l’accident, comme par exemple les moyens de lutte contre le feu à utiliser ou à proscrire, la nécessité d’étendre ou non le périmètre de la zone d’évacuation dans l’attente d’informations plus détaillées sur le chargement et l’état des colis, les protections individuelles à utiliser pour les personnels des services de secours, etc. Une fois son centre de crise national gréé, l’ASN serait en mesure d’offrir son concours au préfet, en lui apportant des conseils techniques sur les actions plus spécifiques à mettre en place. L’IRSN appuierait l’ASN dans cette mission, en évaluant l’état du colis, les évolutions possibles de la situation et les conséquences associées. De plus, la division territoriale de l’ASN dépêcherait un agent auprès du préfet afin de faciliter la liaison avec le centre national de crise.
En parallèle, des moyens humains et matériels seraient envoyés dès que possible sur le lieu de l’accident (appareils de mesure de la radioactivité, moyens médicaux, moyens de reprise des colis, etc.). Les équipes de pompiers spécialisées dans le risque radioactif (les CMIR) seraient mises à contribution, ainsi que les cellules mobiles de l’IRSN voire les cellules mobiles de certains exploitants nucléaires (comme le CEA ou EDF par exemple), qui pourraient être réquisitionnées par le préfet en cas de besoin, même si le transport impliqué ne concernait pas ces exploitants.
Comme pour les autres types de crise, la communication est un enjeu important. Les pouvoirs publics seraient amenés à communiquer sur l’accident, les actions en cours et sur les consignes sur la conduite à tenir par la population.
Les exercices de crise
Afin de préparer les pouvoirs publics à l’éventualité d’un accident impliquant un transport de substances radioactives, des exercices sont organisés et permettent de tester l’ensemble de l’organisation qui serait mise en place. Ils impliquent généralement les services préfectoraux, les services de secours, l’ASN, l’IRSN et un transporteur.
En savoir plus :
Fiche pédagogique - Le transport de combustible MOX neuf
Le transport de combustible MOX neuf
Le combustible MOX, fabriqué dans l’usine MELOX d’Orano, est utilisé dans certains réacteurs nucléaires.
En savoir plus :
La plupart des transports de combustible MOX neuf ont pour destination les centrales nucléaires françaises. Cependant, dans certains cas, du combustible MOX neuf peut être expédié vers une centrale nucléaire étrangère. Les modèles de colis de transport utilisés peuvent alors être différents mais les exigences réglementaires restent identiques (voir II. ci-dessous).
Du fait de la présence de plutonium, le combustible MOX neuf présente des enjeux de sûreté et de radioprotection supérieurs au combustible constitué d’oxyde d’uranium. Il est donc transporté dans des colis spécifiques, offrant une forte protection radiologique et capables de résister à des accidents sévères.
Exigence de sûreté pour les transports de combustible MOX neuf
Les transports de combustible MOX neuf sont encadrés par une réglementation spécifique, reposant sur des prescriptions élaborées par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), afin de protéger le public, les travailleurs et l’environnement des risques que ces transports peuvent présenter : le risque d’irradiation externe de personnes, le risque d’inhalation ou d’ingestion de particules radioactives, la contamination de l’environnement, le démarrage d’une réaction nucléaire en chaîne non contrôlée (risque de criticité).
En savoir plus :
La sûreté des transports de combustible MOX neuf, comme la sûreté des installations nucléaires, est fondée sur une approche de défense en profondeur, qui consiste à mettre en œuvre plusieurs niveaux de protection, techniques ou organisationnels, afin de garantir la sûreté du public, des travailleurs et de l’environnement, y compris en cas d’accident sévère. Dans le cas du transport, cette approche repose sur trois niveaux de protection :
La robustesse du colis
La robustesse du colis permet d’assurer un maintien des fonctions de sûreté, y compris en cas d’accident sévère. Afin de garantir cette robustesse, la réglementation prévoit que le colis doit résister à des épreuves simulant des incidents et accidents. Les transports de substances radioactives pouvant avoir lieu partout en France, il n’est pas possible d’exclure la possibilité d’un accident survenant loin des services de secours spécialisés. La robustesse des colis est donc particulièrement importante : le colis doit apporter par lui-même une protection suffisante pour limiter les conséquences d’un accident sur la population et l’environnement.
Le combustible MOX neuf est transporté dans des colis dits « de type B pouvant contenir des matières fissiles ». Ces modèles de colis doivent être agréés par l’ASN, après instruction technique de leurs dossiers de sûreté démontrant leur capacité à résister aux épreuves réglementaires simulant des conditions accidentelles sévères (équivalent des « crash-tests » de l’industrie automobile) :
- une épreuve de chute de 9 m de haut sur une cible indéformable. Le fait que la cible soit indéformable signifie que toute l’énergie de la chute sera absorbée par le colis, ce qui est très pénalisant. En effet, si un colis lourd chute lors d’un transport, le sol se déformera et absorbera donc une partie de l’énergie. Ainsi, une chute sur une cible indéformable de 9 m peut donc correspondre à une chute d’une hauteur nettement plus élevée sur un sol qui se déformera.
Cette épreuve permet également de simuler le cas où le véhicule percuterait un obstacle. Lors de la chute libre de 9 m, le colis arrive à environ 50 km/h sur la cible. L’essai correspond là encore à un choc réel à plus grande vitesse car, dans la réalité, le véhicule et l’obstacle absorberaient tous deux une partie de l’énergie ; - une épreuve de poinçonnement : le colis est lâché depuis 1 m de hauteur sur un poinçon métallique. Le but est de simuler l’agression du colis par des objets perforants (par exemple des débris arrachés au véhicule lors d’un accident) ;
- une épreuve d’incendie de 800° C pendant 30 min. Cette épreuve simule le fait que le véhicule puisse prendre feu après un accident ;
- une épreuve d’immersion sous 15 m d’eau pendant 8 heures et sous 200 m d’eau pendant une heure. Ces épreuves permettent de tester la résistance à la pression, dans l’hypothèse où le colis tomberait dans de l’eau (dans un fleuve en bord de route ou dans un port lors du déchargement d’un navire)
En savoir plus :
La fiabilité des opérations de transport
Qui permet de réduire l’occurrence des anomalies, des incidents et des accidents. Cette fiabilité est assurée par le respect des exigences réglementaires, telles que la formation des différents opérateurs, la mise en place d’un système d’assurance de la qualité pour toutes les opérations, le respect des conditions d’utilisation des colis, l’arrimage efficace des colis, la signalisation des colis et des véhicules, etc.
En savoir plus :
La gestion des situations d’urgence
Qui permet de limiter les conséquences des incidents et des accidents. Ceci passe par exemple par la préparation et la diffusion de consignes pour les différents acteurs à appliquer en cas d’urgence, la mise en place de plans d’urgence, la réalisation d’exercices de crise.
En savoir plus :
La radioprotection autour des transports de combustible MOX neuf
La radioprotection des travailleurs et du public doit être assurée lors des transports de substances radioactives. Comme pour toutes les activités nucléaires, la réglementation prévoit d’une part que toute exposition, même faible, doit être optimisée, c'est-à-dire réduite aussi bas que raisonnablement possible et, d’autre part, que les doses reçues restent inférieures à 1 mSv[1]/an pour le public et 20 mSv/an pour les travailleurs.
La réglementation prévoit que :
- le débit de dose à la surface du colis ne doit pas dépasser 2 mSv/h. Cette limite peut cependant être portée à 10 mSv/h en « utilisation exclusive » car l’expéditeur ou le destinataire peuvent alors donner des consignes spécifiques pour limiter la présence à proximité du colis ;
- dans tous les cas, le débit de dose ne doit pas dépasser 2 mSv/h au contact du véhicule (ou du wagon) et doit être inférieure à 0,1 mSv/h à 2 mètres du véhicule (ou du wagon).
Ainsi, en supposant qu’un véhicule de transport atteigne la limite de 0,1 mSv/h à 2 mètres, une personne devrait séjourner 10 heures en continu à deux mètres du véhicule avant que la dose reçue atteigne la limite annuelle d’exposition applicable à une personne du public.
La réglementation fixe de plus une limite sur le niveau de contamination des surfaces externes des colis. Il doit être inférieur à 4 Bq/cm2 en général et 0,4 Bq/cm2 pour les radionucléides émettant des particules alpha de haute énergie (qui sont particulièrement nocives).
Outre ces limites, la réglementation impose des exigences relatives à l’organisation de la radioprotection au sein des entreprises. Ainsi, les entreprises intervenant dans les opérations de transport doivent mettre en place un programme de protection radiologique, qui regroupe les dispositions prises pour protéger les travailleurs et le public des risques liés à l’exposition aux rayonnements ionisants. Ce programme repose notamment sur une évaluation des doses susceptibles d’être reçues par les travailleurs et le public. En fonction des résultats de cette évaluation, des actions d’optimisation doivent être mises en place pour rendre ces doses aussi basses que raisonnablement possible (principe ALARA). Enfin, l’ensemble des acteurs du transport doit être formé et sensibilisé aux risques liés aux rayonnements afin d’avoir conscience de la nature des risques, de la manière de s’en protéger et de protéger les autres.
En savoir plus :
Contrôle des transports
L’ASN est chargée du contrôle de la sûreté et de la radioprotection des transports de substances radioactives en France. À ce titre, l’ASN réalise notamment plus d’une centaine d’inspections par an, qui portent sur toutes les étapes de la vie des colis, de leur fabrication et leur maintenance, à leur préparation en vue des transports, leur expédition, leur acheminement et leur réception.
Certaines inspections portent spécifiquement sur l’exercice des responsabilités des expéditeurs de colis, notamment sur les contrôles de radioprotection à réaliser avant le départ. Par exemple en septembre 2015, des mesures de radioprotection indépendantes de celles des responsables de transport avaient été réalisées par l’ASN, avec l’appui technique de l’IRSN, à l’occasion d’un transport de déchets vitrifiés à destination de la Suisse. Les inspecteurs avaient conclu que les limites réglementaires étaient respectées. Les lettres de suite de toutes les inspections de l’ASN sont publiques et consultables sur son site internet.
En savoir plus :
Itinéraire du convoi
Les colis de combustible MOX neuf sont transportés sur route, avec une escorte. Il s’agit de voies publiques : en effet, il n’existe pas de réseau routier dédié aux transports de substances radioactives en France.
L’ASN n’est pas consultée sur le choix des itinéraires de transports de substances radioactives. Aucune validation administrative par l’ASN de ces itinéraires n’est par ailleurs prévue par la réglementation. Pour des raisons de sécurité, les itinéraires ne peuvent pas être rendus publics, même après le passage des colis.
En effet, le combustible MOX neuf contenant des matières fissiles, son transport est également soumis à des exigences additionnelles visant à assurer sa protection contre le vol ou le détournement ou à prévenir et, si nécessaire, répondre à des actes malveillants. Ces exigences sont issues du code de la défense et leur application est contrôlée par les services du Haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère chargé de l’énergie.
Données concernant les flux de transport et notification des transports
- Environ un million de colis de substances radioactives sont transportés chaque année en France. Parmi ceux-ci, environ 114 000 colis concernent l’industrie électro-nucléaire, ce qui occasionne 19 000 transports. On dénombre annuellement environ :
- 200 transports organisés pour envoyer le combustible irradié des centrales nucléaires exploitées par EDF vers l’usine de retraitement Orano de La Hague ;
- une centaine de transports de plutonium sous forme d’oxyde entre l’usine de retraitement de La Hague et l’usine de production de combustible MOX de MELOX, située dans le Gard ;
- 250 transports d’hexafluorure d’uranium (UF6) servant à la fabrication du combustible ;
- 400 transports de combustible neuf à base d’uranium et une cinquantaine de transports de combustible MOX neuf.
[1] Millisievert (mSv) : unité d'équivalent de dose qui permet de rendre compte de l'effet biologique produit par une dose de rayonnement absorbée donnée sur un organisme vivant
Fiche pédagogique - Le transport de combustible irradié
Les évacuations de combustible irradié
À l’issue de son utilisation dans les centrales nucléaires, le combustible nucléaire irradié est retiré du cœur du réacteur et est stocké jusqu’à plusieurs années en piscine sur le site. Ces piscines ne peuvent cependant contenir qu’un nombre limité d’assemblages de combustible et, après un temps de refroidissement suffisant, le combustible irradié doit donc être évacué vers le site de La Hague, où il sera retraité. La plupart des transports de combustible irradié arrivant à La Hague ont pour origine les centrales nucléaires françaises. Cependant, dans certains cas, le combustible irradié peut provenir de l’étranger. Les modèles de colis de transport utilisés peuvent alors être différents mais les exigences réglementaires restent identiques (voir ci-dessous).
Le combustible irradié est très radioactif et présente donc des enjeux importants de sûreté et de radioprotection. Il est donc transporté dans des colis spécifiques, offrant une forte protection radiologique et capables de résister à des accidents sévères.
Exigence de sûreté pour les transports de combustible irradié
Les transports de combustible irradié sont encadrés par une réglementation spécifique, reposant sur des prescriptions élaborées par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), afin de protéger le public, les travailleurs et l’environnement des risques que ces transports peuvent présenter : le risque d’irradiation externe de personnes, le risque d’inhalation ou d’ingestion de particules radioactives, la contamination de l’environnement, le démarrage d’une réaction nucléaire en chaîne non contrôlée (risque de criticité).
En savoir plus :
La sûreté des transports de combustible irradié, comme la sûreté des installations nucléaires, est fondée sur une approche de défense en profondeur, qui consiste à mettre en œuvre plusieurs niveaux de protection, techniques ou organisationnels, afin de garantir la sûreté du public, des travailleurs et de l’environnement, y compris en cas d’accident sévère. Dans le cas du transport, cette approche repose sur trois niveaux de protection :
La robustesse du colis
Qui permet d’assurer un maintien des fonctions de sûreté, y compris en cas d’accident sévère. Afin de garantir cette robustesse, la réglementation prévoit que le colis doit résister à des épreuves simulant des incidents et accidents. Les transports de substances radioactives pouvant avoir lieu partout en France, il n’est pas possible d’exclure la possibilité d’un accident survenant loin des services de secours spécialisés. La robustesse des colis est donc particulièrement importante : le colis doit apporter par lui-même une protection suffisante pour limiter les conséquences d’un accident sur la population et l’environnement.
Le combustible irradié est transporté dans des colis dits « de type B pouvant contenir des matières fissiles » (colis de modèles TN 12/2, TN 13/2 ou TN 112 pour le combustible irradié français). Ces modèles de colis doivent être agréés par l’ASN, après instruction technique de leurs dossiers de sûreté démontrant leur capacité à résister aux épreuves réglementaires simulant des conditions accidentelles sévères (équivalent des « crash-tests » de l’industrie automobile) :
- une épreuve de chute de 9 m de haut sur une cible indéformable. Le fait que la cible soit indéformable signifie que toute l’énergie de la chute sera absorbée par le colis, ce qui est très pénalisant. En effet, si un colis lourd chute lors d’un transport, le sol se déformera et absorbera donc une partie de l’énergie. Ainsi, une chute sur une cible indéformable de 9 m peut donc correspondre à une chute d’une hauteur nettement plus élevée sur un sol qui se déformera.
Cette épreuve permet également de simuler le cas où le véhicule percuterait un obstacle. Lors de la chute libre de 9 m, le colis arrive à environ 50 km/h sur la cible. L’essai correspond là encore à un choc réel à plus grande vitesse car, dans la réalité, le véhicule et l’obstacle absorberaient tous deux une partie de l’énergie ; - une épreuve de poinçonnement : le colis est lâché depuis 1 m de hauteur sur un poinçon métallique. Le but est de simuler l’agression du colis par des objets perforants (par exemple des débris arrachés au véhicule lors d’un accident) ;
- une épreuve d’incendie de 800 °C pendant 30 min. Cette épreuve simule le fait que le véhicule puisse prendre feu après un accident ;
- une épreuve d’immersion sous 15 m d’eau pendant 8 heures et sous 200 m d’eau pendant une heure. Ces épreuves permettent de tester la résistance à la pression dans l’hypothèse où le colis tomberait dans de l’eau (dans un fleuve en bord de route ou dans un port lors du déchargement d’un navire).
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La fiabilité des opérations de transport
Qui permet de réduire l’occurrence des anomalies, des incidents et des accidents. Cette fiabilité est assurée par le respect des exigences réglementaires, telles que la formation des différents opérateurs, la mise en place d’un système d’assurance de la qualité pour toutes les opérations, le respect des conditions d’utilisation des colis, l’arrimage efficace des colis, la signalisation des colis et des véhicules, etc.
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La gestion des situations d’urgence
Qui permet de limiter les conséquences des incidents et des accidents. Ceci passe par exemple par la préparation et la diffusion de consignes pour les différents acteurs à appliquer en cas d’urgence, la mise en place de plans d’urgence, la réalisation d’exercices de crise.
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La radioprotection autour des transports de combustible irradié
La radioprotection des travailleurs et du public doit être assurée lors des transports de substances radioactives. Comme pour toutes les activités nucléaires, la réglementation prévoit d’une part que toute exposition, même faible, doit être optimisée, c'est-à-dire réduite aussi bas que raisonnablement possible et, d’autre part, que les doses reçues restent inférieures à 1 mSv[1]/an pour le public et 20 mSv/an pour les travailleurs.
La réglementation prévoit que :
- le débit de dose à la surface du colis ne doit pas dépasser 2 mSv/h. Cette limite peut cependant être portée à 10 mSv/h en « utilisation exclusive » car l’expéditeur ou le destinataire peuvent alors donner des consignes spécifiques pour limiter la présence à proximité du colis ;
- dans tous les cas, le débit de dose ne doit pas dépasser 2 mSv/h au contact du véhicule (ou du wagon) et doit être inférieure à 0,1 mSv/h à 2 mètres du véhicule (ou du wagon).
Ainsi, en supposant qu’un véhicule de transport atteigne la limite de 0,1 mSv/h à 2 mètres, une personne devrait séjourner 10 heures en continu à deux mètres du véhicule avant que la dose reçue atteigne la limite annuelle d’exposition applicable à une personne du public.
La réglementation fixe de plus une limite sur le niveau de contamination des surfaces externes des colis. Il doit être inférieur à 4 Bq/cm2 en général et 0,4 Bq/cm2 pour les radionucléides émettant des particules alpha de haute énergie (qui sont particulièrement nocives).
Outre ces limites, la réglementation impose des exigences relatives à l’organisation de la radioprotection au sein des entreprises. Ainsi, les entreprises intervenant dans les opérations de transport doivent mettre en place un programme de protection radiologique, qui regroupe les dispositions prises pour protéger les travailleurs et le public des risques liés à l’exposition aux rayonnements ionisants. Ce programme repose notamment sur une évaluation des doses susceptibles d’être reçues par les travailleurs et le public. En fonction des résultats de cette évaluation, des actions d’optimisation doivent être mises en place pour rendre ces doses aussi basses que raisonnablement possible (principe ALARA). Enfin, l’ensemble des acteurs du transport doit être formé et sensibilisé aux risques liés aux rayonnements afin d’avoir conscience de la nature des risques, de la manière de s’en protéger et de protéger les autres.
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Contrôle des transports
L’ASN est chargée du contrôle de la sûreté et de la radioprotection des transports de substances radioactives en France. À ce titre, l’ASN réalise notamment plus d’une centaine d’inspections par an, qui portent sur toutes les étapes de la vie des colis, de leur fabrication et leur maintenance, à leur préparation en vue des transports, leur expédition, leur acheminement et leur réception.
Certaines inspections portent spécifiquement sur l’exercice des responsabilités des expéditeurs de colis, notamment sur les contrôles de radioprotection à réaliser avant le départ. Par exemple en septembre 2015, des mesures de radioprotection indépendantes de celles des responsables de transport avaient été réalisées par l’ASN, avec l’appui technique de l’IRSN, à l’occasion d’un transport de déchets vitrifiés à destination de la Suisse. Les inspecteurs avaient conclu que les limites réglementaires étaient respectées. Compte-tenu de leurs enjeux et de leur fréquence, les évacuations de combustible irradié font régulièrement l’objet d’inspections de l’ASN. Les lettres de suite de toutes les inspections de l’ASN sont publiques et consultables sur son site internet.
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Itinéraire du convoi
Les colis de combustible irradié sont transportés en partie sur route, avec une escorte, et en partie sur voie ferrée. Il s’agit de voies publiques : en effet, il n’existe ni réseau routier, ni réseau de voies ferrées dédiés aux transports de substances radioactives en France.
L’ASN n’est pas consultée sur le choix des itinéraires de transports de substances radioactives. Aucune validation administrative par l’ASN de ces itinéraires n’est par ailleurs prévue par la réglementation. Pour des raisons de sécurité, les itinéraires ne peuvent pas être rendus publics, même après le passage des colis.
En effet, le combustible irradié contenant des matières fissiles, son transport est également soumis à des exigences additionnelles visant à assurer sa protection contre des actes malveillants. Ces exigences sont issues du code de la défense et leur application est contrôlée par les services du Haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère chargé de l’énergie.
Données concernant les flux de transport et notification des transports
Environ un million de colis de substances radioactives sont transportés chaque année en France. Parmi ceux-ci, environ 114 000 colis concernent l’industrie électro-nucléaire, ce qui occasionne 19 000 transports. On dénombre annuellement environ :
- 200 transports organisés pour envoyer le combustible irradié des centrales nucléaires exploitées par EDF vers l’usine de retraitement Orano de La Hague ;
- une centaine de transports de plutonium sous forme d’oxyde entre l’usine de retraitement de La Hague et l’usine de production de combustible MOX de MELOX, située dans le Gard ;
- 250 transports d’hexafluorure d’uranium (UF6) servant à la fabrication du combustible ;
- 400 transports de combustible neuf à base d’uranium et une cinquantaine de transports de combustible neuf « MOX » à base d’uranium et de plutonium.
[1] Millisievert (mSv) : unité d'équivalent de dose qui permet de rendre compte de l'effet biologique produit par une dose de rayonnement absorbée donnée sur un organisme vivant
Fiche pédagogique - Le transport de déchets de haute activité
Les transports de déchets de haute activité
L’usine Orano de La Hague permet de retraiter le combustible nucléaire irradié provenant des centrales nucléaires. L’opération de retraitement vise à récupérer de l’uranium et du plutonium, qui peuvent ensuite être réutilisés dans les centrales nucléaires sous forme de combustible MOX. À l’issue de ce processus, des déchets ultimes sont produits, dont les plus actifs sont de deux types :
- Les déchets vitrifiés
Ils contiennent les produits de fission et d’actinides mineurs, calcinés puis incorporés dans une matrice de verre, avant d’être conditionnés dans un conteneur métallique (ce sont ces conteneurs qui seront ensuite chargés dans les colis de transport). Les conteneurs de déchets vitrifiés les plus actifs sont de type CSD-V. Chaque conteneur pèse environ 550 kg.
D’autres types de conteneurs existent (CSD-B et CSD-U). Ils correspondent à des déchets vitrifiés généralement un peu moins radioactifs que ceux des CSD-V.
- Les déchets compactés
Les conteneurs de déchets compactés (CSD-C) contiennent les structures métalliques des assemblages de combustible irradié. Le CSD-C est un cylindre en acier inoxydable, contenant 520 kg de déchets métalliques compactés.
Dans son inventaire national, l’ANDRA classe les déchets vitrifiés dans la catégorie des « déchets de haute activité », car leur niveau d’activité est supérieur à plusieurs milliards de becquerels par gramme, et les déchets compactés dans la catégorie des « déchets de moyenne activité à vie longue », car leur niveau d’activité est de l’ordre d’un million à un milliard de becquerels par gramme. Toutefois, la réglementation applicable aux transports de substances radioactives ne distingue pas ces deux catégories et prévoit les mêmes exigences dans les deux cas. La présente fiche traite des déchets de haute activité mais est donc également valable pour les déchets compactés.
Les déchets vitrifiés et compactés issus du retraitement du combustible irradié des centrales nucléaires françaises sont entreposés sur le site de La Hague en attendant une solution de stockage. Ces déchets ne sont donc pas transportés actuellement. En revanche, l’usine de La Hague assure également le retraitement de combustible irradié provenant de l’étranger. Conformément à la loi française, les déchets vitrifiés et compactés résultants doivent être renvoyés dans les pays d’origine, ce qui occasionne des transports traversant la France. De même, des déchets vitrifiés et compactés sont parfois renvoyés depuis l’usine de retraitement anglaise de Sellafield et peuvent de ce fait transiter par la France.
Les déchets vitrifiés et compactés présentent des enjeux de sûreté et de radioprotection importants. Ils sont donc transportés dans des colis spécifiques, offrant une forte protection radiologique et capables de résister à des accidents sévères.
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Exigence de sûreté pour les transports de déchets de haute activité
Les transports de déchets de haute activité sont encadrés par une réglementation spécifique, reposant sur des prescriptions élaborées par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), afin de protéger le public, les travailleurs et l’environnement des risques que ces transports peuvent présenter : le risque d’irradiation externe de personnes, le risque d’inhalation ou d’ingestion de particules radioactives, la contamination de l’environnement, le démarrage d’une réaction nucléaire en chaîne non contrôlée (risque de criticité).
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La sûreté des transports de déchets de haute activité, comme la sûreté des installations nucléaires, est fondée sur une approche de défense en profondeur, qui consiste à mettre en œuvre plusieurs niveaux de protection, techniques ou organisationnels, afin de garantir la sûreté du public, des travailleurs et de l’environnement, y compris en cas d’accident sévère. Dans le cas du transport, cette approche repose sur trois niveaux de protection :
La robustesse du colis
Qui permet d’assurer un maintien des fonctions de sûreté, y compris en cas d’accident sévère. Afin de garantir cette robustesse, la réglementation prévoit que le colis doit résister à des épreuves simulant des incidents et accidents. Les transports de substances radioactives pouvant avoir lieu partout en France, il n’est pas possible d’exclure la possibilité d’un accident survenant loin des services de secours spécialisés. La robustesse des colis est donc particulièrement importante : le colis doit apporter par lui-même une protection suffisante pour limiter les conséquences d’un accident sur la population et l’environnement.
Les déchets de haute activité sont transportés dans des colis dits « de type B pouvant contenir des matières fissiles ». Ces modèles de colis doivent être agréés par l’ASN, après instruction technique de leurs dossiers de sûreté démontrant leur capacité à résister aux épreuves réglementaires simulant des conditions accidentelles sévères (équivalent des « crash-tests » de l’industrie automobile) :
- une épreuve de poinçonnement : le colis est lâché depuis 1 m de hauteur sur un poinçon métallique. Le but est de simuler l’agression du colis par des objets perforants (par exemple des débris arrachés au véhicule lors d’un accident) ;
- une épreuve d’incendie de 800 °C pendant 30 min. Cette épreuve simule le fait que le véhicule puisse prendre feu après un accident ;
- une épreuve d’immersion sous 15 m d’eau pendant 8 heures et sous 200 m d’eau pendant une heure. Ces épreuves permettent de tester la résistance à la pression, dans l’hypothèse où le colis tomberait dans de l’eau (dans un fleuve en bord de route ou dans un port lors du déchargement d’un navire).
En savoir plus :
La fiabilité des opérations de transport
Qui permet de réduire l’occurrence des anomalies, des incidents et des accidents. Cette fiabilité est assurée par le respect des exigences réglementaires, telles que la formation des différents opérateurs, la mise en place d’un système d’assurance de la qualité pour toutes les opérations, le respect des conditions d’utilisation des colis, l’arrimage efficace des colis, la signalisation des colis et des véhicules, etc.
En savoir plus :
La gestion des situations d’urgence
Qui permet de limiter les conséquences des incidents et des accidents. Ceci passe par exemple par la préparation et la diffusion de consignes pour les différents acteurs à appliquer en cas d’urgence, la mise en place de plans d’urgence, la réalisation d’exercices de crise.
En savoir plus :
La radioprotection autour des transports de déchets de haute activité
La radioprotection des travailleurs et du public doit être assurée lors des transports de substances radioactives. Comme pour toutes les activités nucléaires, la réglementation prévoit d’une part que toute exposition, même faible, doit être optimisée, c'est-à-dire réduite aussi bas que raisonnablement possible et, d’autre part, que les doses reçues restent inférieures à 1 mSv[1]/an pour le public et 20 mSv/an pour les travailleurs.
La réglementation prévoit que :
- le débit de dose à la surface du colis ne doit pas dépasser 2 mSv/h. Cette limite peut cependant être portée à 10 mSv/h en « utilisation exclusive » car l’expéditeur ou le destinataire peuvent alors donner des consignes spécifiques pour limiter la présence à proximité du colis ;
- dans tous les cas, le débit de dose ne doit pas dépasser 2 mSv/h au contact du véhicule (ou du wagon) et doit être inférieure à 0,1 mSv/h à 2 mètres du véhicule (ou du wagon).
Ainsi, en supposant qu’un véhicule de transport atteigne la limite de 0,1 mSv/h à 2 mètres, une personne devrait séjourner 10 heures en continu à deux mètres du véhicule avant que la dose reçue atteigne la limite annuelle d’exposition applicable à une personne du public.
La réglementation fixe de plus une limite sur le niveau de contamination des surfaces externes des colis. Il doit être inférieur à 4 Bq/cm2 en général et 0,4 Bq/cm2 pour les radionucléides émettant des particules alpha de haute énergie (qui sont particulièrement nocives).
Outre ces limites, la réglementation impose des exigences relatives à l’organisation de la radioprotection au sein des entreprises. Ainsi, les entreprises intervenant dans les opérations de transport doivent mettre en place un programme de protection radiologique, qui regroupe les dispositions prises pour protéger les travailleurs et le public des risques liés à l’exposition aux rayonnements ionisants. Ce programme repose notamment sur une évaluation des doses susceptibles d’être reçues par les travailleurs et le public. En fonction des résultats de cette évaluation, des actions d’optimisation doivent être mises en place pour rendre ces doses aussi basses que raisonnablement possible (principe ALARA). Enfin, l’ensemble des acteurs du transport doit être formé et sensibilisé aux risques liés aux rayonnements afin d’avoir conscience de la nature des risques, de la manière de s’en protéger et de protéger les autres.
En savoir plus :
Contrôle des transports
L’ASN est chargée du contrôle de la sûreté et de la radioprotection des transports de substances radioactives en France. À ce titre, l’ASN réalise notamment plus d’une centaine d’inspections par an, qui portent sur toutes les étapes de la vie des colis, de leur fabrication et leur maintenance, à leur préparation en vue des transports, leur expédition, leur acheminement et leur réception.
Certaines inspections portent spécifiquement sur l’exercice des responsabilités des expéditeurs de colis, notamment sur les contrôles de radioprotection à réaliser avant le départ. Par exemple en septembre 2015, des mesures de radioprotection indépendantes de celles des responsables de transport avaient été réalisées par l’ASN, avec l’appui technique de l’IRSN, à l’occasion d’un transport de déchets vitrifiés à destination de la Suisse. Les inspecteurs avaient conclu que les limites réglementaires étaient respectées. Les lettres de suite de toutes les inspections de l’ASN sont publiques et consultables sur son site internet.
En savoir plus :
Itinéraire du convoi
Les colis de déchets de haute activité sont transportés en partie sur route, avec une escorte, et en partie sur voie ferrée. Il s’agit de voies publiques : en effet, il n’existe ni réseau routier, ni réseau de voies ferrées dédiés aux transports de substances radioactives en France.
L’ASN n’est pas consultée sur le choix des itinéraires de transports de substances radioactives. Aucune validation administrative par l’ASN de ces itinéraires n’est par ailleurs prévue par la réglementation. Pour des raisons de sécurité, les itinéraires ne peuvent pas être rendus publics, même après le passage des colis.
En effet, les déchets de haute activité contenant des matières fissiles, leur transport est également soumis à des exigences additionnelles visant à assurer sa protection contre le vol ou le détournement ou à prévenir et, si nécessaire, répondre à des actes malveillants. Ces exigences sont issues du code de la défense et leur application est contrôlée par les services du Haut fonctionnaire de défense et de sécurité du ministère chargé de l’énergie.
Données concernant les flux de transport et notification des transports
Environ un million de colis de substances radioactives sont transportés chaque année en France. Parmi ceux-ci, environ 114 000 colis concernent l’industrie électro-nucléaire, ce qui occasionne 19 000 transports. On dénombre annuellement environ :
- 200 transports organisés pour envoyer le combustible irradié des centrales nucléaires exploitées par EDF vers l’usine de retraitement Orano de La Hague ;
- une centaine de transports de plutonium sous forme d’oxyde entre l’usine de retraitement de La Hague et l’usine de production de combustible MOX de MELOX, située dans le Gard ;
- 250 transports d’hexafluorure d’uranium (UF6) servant à la fabrication du combustible ;
- 400 transports de combustible neuf à base d’uranium et une cinquantaine de transports de combustible neuf « MOX » à base d’uranium et de plutonium.
Les transports de déchets de haute activité sont assez rares et correspondent à un flux de quelques colis par an (en incluant les déchets compactés : cf. I). Les enjeux présentés par les transports de déchets de haute activité sont similaires à ceux des transports de combustible irradié.
[1] Millisievert (mSv) : unité d'équivalent de dose qui permet de rendre compte de l'effet biologique produit par une dose de rayonnement absorbée donnée sur un organisme vivant