Livre blanc du Tritium & bilan des rejets de tritium pour les INB

34 Sources de production et gestion du tritium produit par les installations nucléaires 4 Inventaire des déchets tritiés Il convient tout d’abord de rappeler qu’entre 1967 et 1982, environ 20 PBq de déchets tritiés ont été éliminés par déversement en mer. Ces immersions ont été interrompues à la suite de la convention de Londres (1972) et aux moratoires qui ont suivi, auxquels la France a souscrit. 4 1 Filières opérationnelles pour les déchets tritiés Les filières disponibles pour l’évacuation de déchets tritiés concernent uniquement les déchets solides et liquides les moins actifs, issus notamment des activités des « petits producteurs », susceptibles d’être traités dans les installations SOCATRI ou CENTRACO (de l’ordre de 200 m3.an-1) ou d’être évacués directement vers les sites de stockage actuels de l’ANDRA (CSTFA ou CSFMA), les critères d’acceptation étant toutefois très restrictifs. Pour mémoire, le stockage de déchets contenant des quantités significatives de tritium, de l’ordre de 1 000 TBq (valeur de l’inventaire initial réactualisée en 2003), au Centre de Stockage de la Manche (CSM), a conduit à un marquage durable de l’environnement, notamment à la suite de l’incident de 1976 19. Ce retour d’expérience a conduit l’ANDRA à limiter fortement les quantités de tritium susceptibles d’être acceptées dans le centre de stockage de déchets de faible et de moyenne activité et à vie courte de Soulaines(CSFMA),misenserviceen1992,pouréviterlemarquageparle tritium des sols et de la nappe phréatique [31]. En effet, le tritium, à l’état d’hydrogène tritié, diffuse facilement, du fait du faible diamètre de son noyau, à travers les différentes barrières, y compris à travers les matériauxutiliséshabituellementpourconfinerlesautresradionucléides, puis migre vers le milieu naturel sous forme de gaz ou d’eau tritiée. De par cette capacité à se déplacer facilement, sous forme de relâchement diffus, hors des colis et des ouvrages de stockage (à l’état d’eau tritiée, le tritium est extrêmement mobile et suit l’eau jusqu’à l’exutoire), le tritium peut provoquer un marquage de l’environnement facilement détectable (dès quelques Bq.L-1), son impact radiologique restant toutefois très réduit compte tenu de sa faible radiotoxicité. En pratique, l’acceptabilité des déchets tritiés au CSFMA est étudiée au cas par cas, en fonction notamment des caractéristiques intrinsèques des colis concernés (taux de dégazage…), de leur nombre et de leur mode de conditionnement. Ainsi, même si ceux-ci sont conformes aux spécifications d’acceptation du CSFMA (en particulier : capacité maximale radiologique du centre de 4 000 TBq, taux de dégazage inférieur à 2 GBq.t-1.j-1, LMA de 2.105  Bq.g-1 et activité inférieure à 1 GBq par fût à compacter), la volonté de l’ANDRA de préserver autant que possible l’absence de marquage du site rend, de fait, très difficile l’évacuation de déchets tritiés des différents sites de production, quelle qu’en soit leur origine, sans traitement ou entreposage préalable. Il convient de noter que, malgré les dispositions de conception et d’exploitation adoptées par l’ANDRA, une présence de tritium a été observée depuis quelques années de manière très ponctuelle et localisée dans la nappe sous le centre, sans toutefois pouvoir l’attribuer de façon certaine au stockage. Le centre de stockage de déchets de très faible activité de Morvilliers (CSTFA), mis en service en 2003, vise le même objectif, le risque de marquage de l’environnement conduisant à limiter l’activité globale acceptée par alvéole. Notamment, un suivi particulier de la migration du tritium est mis en œuvre selon une méthodologie définissant un certain nombre d’indicateurs environnementaux et de seuils indicatifs en termes d’activité totale stockée sur le centre. Dans ce cadre, l’acceptation d’un lot de déchets contenant du tritium est jugée notamment sur la base d’une évaluation préalable de la quantité totale de tritium contenue dans le lot. Le centre de stockage FAMA de l’Aube Par ailleurs, les déchets contenant des radionucléides « à vie longue », tels que les déchets de structure (coques et embouts) issus du traitement de combustibles usés aujourd’hui compactés (colis CSD-C), les déchets de graphite issus du démantèlement des réacteurs graphite-gaz où les barres de contrôle des réacteurs à base de carbure de bore (B 4 C), peuvent également contenir des quantités significatives de tritium. Celui-ci, piégé dans ces déchets notamment sous forme d’hydrures, y est très peu mobile (le taux de dégazage est inférieur à 10-6.an-1). Ces déchets sont destinés aux futurs centres de stockage en formation géologique profonde HA/MA-VL et en sub-surface FA-VL actuellement à l’étude. Plus précisément : • le modèle d’inventaire des colis de déchets HA-VL [32], utilisé par l’ANDRA pour les études de faisabilité du stockage, fait état d’environ 40 000 colis de déchets compactés CSD-C (déchets de type B) produits principalement par les ateliers de cisaillagedissolution des usines de La Hague et contenant au maximum 20 TBq par colis (pour un temps de refroidissement moyen de 8 ans, après déchargement du réacteur), soit un inventaire total de l’ordre de 800 PBq ; • le dossier établi par l’ANDRA (2004), relatif à la conception d’un centre de stockage en sub-surface des déchets de graphite, fait état d’environ 20 000 tonnes de déchets de graphite issus du démantèlement des réacteurs UNGG de première génération, l’activité totale en tritium contenue dans ces déchets étant estimée à environ 4 670 TBq ; • les barres de contrôle borées des réacteurs PWR peuvent contenir jusqu’à environ 2 TBq.GWe-1 en fin de vie. 20 Il n’est pas acquis non plus que cette capacité soit utilisée en totalité, eu égard notamment aux inquiétudes que suscite le marquage des nappes phréatiques dans le public. 21 D’un point de vue réglementaire, les choix en matière de rejets retenus par les producteurs doivent être clairement explicités et justifiés dans les dossiers de demandes d’autorisation de rejets et les référentiels de sûreté des installations concernées, leur approbation ne pouvant relever que d’une étude au cas par cas. De plus, les dispositions permettant d’optimiser les rejets doivent être définies dès la phase de conception des installations. Cette optimisation doit également être envisagée durant toute la durée d’exploitation des installations, dans le cadre des réexamens de sûreté décennaux, voire au titre des autorisations de rejets demandant notamment la transmission à une échéance renouvelée d’études technico-économiques visant à réduire les rejets chimiques et radiologiques de l’installation (cas par exemple de l’arrêté d’autorisation de rejets de l’établissement AREVA de La Hague). Ainsi, l’exploitant doit démontrer qu’il a optimisé ses rejets et utilisé les meilleures techniques disponibles dans des conditions réalisables, compatibles avec les enjeux de sûreté et de radioprotection et à un coût économiquement acceptable, au même titre qu’il doit démontrer que la sûreté de son installation est au meilleur niveau raisonnablement possible.

RkJQdWJsaXNoZXIy NjQ0NzU=