Rapport de l'ASN 2019
France métropolitaine est estimé à environ 4000 par an, loin der‑ rière celui dû au tabac (près de 69000). À l’initiative de l’ASN, un plan national d’action pour la gestion des risques liés au radon a été mis en place depuis 2004, il est périodiquement réactua‑ lisé (voir point 3.2.2). 1.3 Les incertitudes scientifiques et la vigilance Les actions menées dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour prévenir les accidents et limiter les nuisances ont permis de réduire les risques sans toutefois les supprimer, qu’il s’agisse, par exemple, des doses reçues par les travailleurs ou de celles associées aux rejets des INB. De nom‑ breuses incertitudes subsistent ; elles conduisent l’ASN à rester attentive aux résultats des travaux scientifiques en cours, en radio‑ biologie et en radiopathologie par exemple, avec des retombées possibles en radioprotection, notamment en ce qui concerne la gestion des risques liés aux faibles doses. On peut citer, en particulier, plusieurs zones d’incertitudes concernant la radiosensibilité, les effets des faibles doses en fonction de l’âge, l’existence de signatures (mutations spéci‑ fiques de l’ADN) qui pourraient être observées dans des cancers radio‑induits et certaines maladies non cancéreuses observées dans les suites de radiothérapie. 1.3.1 La radiosensibilité Les effets des rayonnements ionisants sur la santé varient d’un individu à l’autre. On sait, par exemple, depuis que cela a été énoncé pour la première fois par Bergonié et Tribondeau en 1906, qu’une même dose n’a pas le même effet selon qu’elle est reçue par un enfant en période de croissance ou par un adulte. Par ailleurs, la variabilité de la radiosensibilité individuelle aux fortes doses de rayonnements ionisants a été bien documentée par les radiothérapeutes et les radiobiologistes. Des niveaux de radiosensibilité élevés ont été constatés dans le cas de sujets souf‑ frant de maladies génétiques de la réparation de l’ADN et de la signalisation cellulaire, ils peuvent chez ces personnes conduire à des «brûlures radiologiques ». Aux faibles doses, il existe une radiosensibilité cellulaire et indi‑ viduelle qui pourrait concerner environ 5 à 10% de la popula‑ tion. Grâce à l’abaissement des seuils de détection, les méthodes récentes d’immunofluorescence de cibles moléculaires de la signa‑ lisation et de la réparation des lésions de l’ADN permettent de mieux documenter les effets des rayonnements ionisants aux faibles doses. Les effets biochimiques et moléculaires d’une simple radiographie deviennent visibles et mesurables. Les recherches effectuées avec ces nouvelles méthodes d’investi‑ gation apportent des résultats qui doivent encore être validés en clinique avant d’être intégrés dans les pratiques médicales. Les progrès de la recherche et la validation des résultats en cli‑ nique devraient permettre de définir rapidement les conditions optimales de surveillance de la radiosensibilité individuelle chez les patients. Dans le cadre des travaux du groupe de recherche européen sur les faibles doses ( MELODI , Multidisciplinary European Low Dose Initiative ) deux documents de revue ont été publiés en 2019. Ils traitent respectivement des aspects cliniques et épidémiologiques de la réponse individuelle aux rayonnements ionisants et des tests de dépistage disponibles et de leur robustesse. 3. Le débit de dose radioactive détermine la dose absorbée (énergie absorbée par la matière par unité de masse et de temps). Il se mesure en Gray par seconde (Gy/s) dans le système international. Il est utilisé en physique et en radioprotection. Le groupe de travail ( TG111 ) de la CIPR dédié à ce sujet élabore par ailleurs, sur la base des connaissances acquises, des recom‑ mandations de radioprotection qu’il prévoit de publier en 2020. La réponse individuelle aux rayonnements ionisants s’impose ainsi progressivement comme un sujet important de recherche et d’application en radiobiologie et en radioprotection, tout en suscitant des questions éthiques et sociétales. 1.3.2 Les effets des faibles doses • La relation linéaire sans seuil L’hypothèse de cette relation, retenue pour modéliser l’effet des faibles doses sur la santé (voir point 1.2), aussi commode soit‑elle sur un plan réglementaire, aussi prudente soit‑elle sur un plan sanitaire, n’a pas toute l’assise voulue sur un plan scientifique. Certains estiment que les effets des faibles doses pourraient être supérieurs, d’autres pensent que ces doses pourraient n’avoir aucun effet en deçà d’un certain seuil ; certains affirment même que des faibles doses ont un effet bénéfique. La recherche en biologie moléculaire et cellulaire progresse, les études épidémio‑ logiques menées sur des cohortes importantes aussi. Mais, face à la complexité des phénomènes de réparation et de mutation de l’ADN, face aux limites méthodologiques de l’épidémiologie, des incertitudes demeurent et la précaution s’impose pour les décideurs publics. • La dose, le débit de dose et la durée de l’exposition Les études épidémiologiques réalisées sur les personnes exposées aux bombardements de Hiroshima et de Nagasaki ont permis de mieux connaître les effets des rayonnements sur la santé, pour des expositions dues à une irradiation externe (exposition externe) en quelques fractions de seconde, à forte dose et fort débit de dose (3) de rayonnements ionisants. Les études menées dans les pays les plus touchés par l’accident de Tchernobyl (la Biélorussie, l’Ukraine et la Russie) ont aussi fait avancer les connaissances sur l’effet des rayonnements sur la santé pour des expositions dues à la contami‑ nation interne (exposition interne), notamment à l’iode radioactif. Les études sur les travailleurs de l’industrie nucléaire ont permis de mieux préciser le risque pour des expositions chroniques à faibles doses établies sur de nombreuses années, que ce soit le résultat d’expositions externes ou de contaminations internes. Salle de radiographie du dispensaire Léon Bourgeois (Paris) en 1916 Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2019 101 01 – LES ACTIVITÉS NUCLÉAIRES : RAYONNEMENTS IONISANTS ET RISQUES POUR LA SANTÉ ET L’ENVIRONNEMENT 01
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